OHADA Doctrine

Focus on the sanction by Cameroonian case law, of errors in the management of statutory auditors in public and para-public sector companies

Docteur DJILA Rose
Chargée de cours FSJP,
Université de DSCHANG, Cameroun

Introduction

Les entreprises du secteur public et parapublic au Cameroun, sont régies par l’acte uniforme OHADA relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique (AUDSGIE), et la loi n° 99/016 du 22 décembre 1999 portant statut général des Etablissements publics et des Entreprises du secteur public et para public. Epousant une forme déclarée commerçante par le droit, elles se déploient généralement comme société anonyme , et peuvent avoir l’Etat, une Collectivité Territoriale Décentralisée, plusieurs partenaires de droit public ou des personnes morales de droit public, comme actionnaires.

La gestion de ces entreprises relève non seulement du droit privé, mais également du droit public. En effet, la participation de l’Etat dans le capital social, leur confère une certaine particularité. A ce titre, elles sont soumises à sa tutelle administrative et financière, et aux textes législatifs et réglementaires en vigueur sur les marchés publics. En outre, bien que transférés en propriété et notamment par apport pour la formation du capital et intégrés de façon définitive dans le patrimoine de l’entreprise bénéficiaire , les biens du domaine privé de l’Etat demeurent des biens publics.
L’Etat intervenant dans l’économie en créant des entreprises, en y prenant des parts, ou en assurant la répartition des fonds publics pour l’investissement, il importe que celles-ci soient bien gérées. Or, elles peuvent être le vecteur de nombreux agissements fautifs, et l’établissement des comptes, l’occasion de manœuvres dolosives aux fins de dissimulation des actes malveillants.

La comptabilité des entreprises étant tenue par un professionnel ou un service ad hoc, il est difficile d’avancer avec certitude que les chiffres qui y sont portés soient irréprochables tant par rapport à l’application des normes comptables et fiscales, qu’ à une éventuelle démarche répréhensible des dirigeants, visant par exemple à sous estimer les résultats dégagés pour payer moins d’impôts , ou exclure un associé de la répartition des bénéfices, qu’à les doper, en vue d’obtenir un emprunt, ou intéresser d’éventuels souscripteurs de capital. En effet, malgré l’existence des organes de représentation intermédiaire, il résulte l’impossibilité pour les partenaires de participer directement à la vie sociale ; d’où le besoin d’une information objective, contrebalançant le pouvoir de fait des dirigeants de la société.

Le commissaire aux comptes , organe de contrôle externe nommé par l’organe délibérant de l’entité contrôlée ou l’assemblée générale , vient renforcer le contrôle des organes internes de ces entreprises. L’objectif de sa mission d’intérêt public est d’obtenir l’assurance raisonnable que les comptes ne comportent pas d’anomalie significative .Par la certification des comptes, les actionnaires, le banquier, le client, le fournisseur, et toute personne intéressée se trouvent plus confiants et rassurés.

Y.GUYON a souligné à juste titre l’originalité de ce professionnel, qui « appartient à la fois à une profession libérale avec tout ce que cela implique traditionnellement d’indépendance individuelle et collective, et à une sorte de magistrature du chiffre. Non seulement il juge les comptes, mais il tend à devenir de plus en plus la conscience morale de la société ».

Les scandales financiers au niveau international, notamment ceux d’ENRON aux Etats Unis, et PARMALAT en Europe, ont mis à mal la crédibilité de cette profession, eu égard à son rôle déterminant quant à la confiance des investisseurs, et des actionnaires dans la sincérité des comptes de la société .Au niveau national, le temps où ce professionnel jouissait du privilège exclusif de l’homme de l’art dont la compétence pouvait faire l’objet d’un doute exclusivement cartésien est dépassé. En effet, des commissaires aux comptes officiant auprès des sociétés d’Etat, ont vu leur responsabilité être mise en cause, tant dans le cadre de l’opération épervier que devant le Conseil de Discipline Budgétaire et Financière , (CDBF), malgré les difficultés liées à l’établissement de la preuve, en raison de l’obligation de moyens caractérisant la mission d’audit.

Aussi, nous a-t-il semblé utile, en tenant compte du contexte actuel caractérisé par l’intensification de la lutte contre les atteintes à la fortune publique, des décisions rendues par les instances sus -citées et ayant fait l’objet de publication et de commentaire dans les quotidiens camerounais , d’analyser le processus de sanction de ce professionnel, en laissant délibérément certaines questions théoriques sans application concrète.

Nous nous intéresserons à cet effet, à la nature des entorses à la législation commises par ce professionnel dans le cadre de ses missions auprès des entreprises publiques, et qualifiés à juste titre de faute de gestion ou d’infraction(1).Par la suite, nous nous intéresserons à la sanction qui en est découlé(2).

Ière partie : La Nature des entorses commises par le commissaire aux comptes auprès des entreprises publiques

Les irrĂ©gularitĂ©s commises par ce professionnel exerçant sa mission auprès d’une entreprise publique, constituent la faute de gestion, en application de l’alinĂ©a 1 de l’article 3 de la loi n° 74/18 du 5 dĂ©cembre 1974 relative Ă  la sanction des ordonnateurs, gestionnaires et gĂ©rants de crĂ©dits publics et des entreprises d’Etat telle que modifiĂ©e par la loi n° 76/4 du 8 juillet 1976 qui dispose : « …Est considĂ©rĂ© comme irrĂ©gularitĂ©, toute faute de gestion prĂ©judiciable Ă  la puissance publique notamment… ».

Tout fait relevant d’une atteinte à la discipline budgétaire et financière, pouvant avoir une connotation pénale, la définition de la faute de gestion(1), précèdera la détermination des irrégularités retenues par les instances compétentes(2).

A. La faute de gestion du commissaire aux comptes

Le premier impératif qui s’impose au commissaire aux comptes auprès d’une entité publique, est le respect de la règle de droit, repérable au niveau des différents textes régissant l’ordre public financier camerounais. L’ignorance du cadre juridique d’emploi des fonds publics constitue par conséquent une violation de la volonté générale, susceptible de sanction.

Les faits qualifiables de faute de gestion, sont des violations des règles encadrant l’utilisation des crédits publics, et qui constituent la discipline financière. Elles s’expriment non seulement à travers les différents textes régissant les finances publiques camerounaises, mais aussi, en ce qui concerne les entreprises publiques, dans un ensemble de dispositions législatives, réglementaires et statutaires régissant leurs activités.

Que l’on considère cette faute dans le cadre de l’administration ou des entreprises publiques et para publiques, le juridique prime l’économique et le financier. Toute opération conforme à la légalité est par conséquent réputée bonne gestion. Cependant, toutes les atteintes à la régularité formelle ne sauraient être prises en considération. En d’autres termes, la faute de gestion de ce professionnel ne peut être passible de sanction que s’il est démontré l’atteinte matérielle subie par la puissance publique. L’introduction du critère économique, matérialisée par la notion du préjudice à la fortune publique constitue dès lors un élément important.

Le champ d’application rationne materiae de la faute de gestion est déterminé par le procédé de l’énumération formelle à laquelle s’ajoute, à titre complémentaire, ce que l’on pourrait considérer comme une clause générale, prouvant à suffisance que les irrégularités énumérées ont simplement une valeur indicative. Globalement, cette faute recouvre tout acte de commission , d’omission ou de négligence ne s’inscrivant pas dans l’intérêt social de l’entreprise. Son périmètre est par conséquent très large et peut regrouper même la faute de négligence ou d’imprudence du moment où celle-ci est suffisamment caractérisée.

La faute de gestion peut, dans certains cas, être constitutive d’une infraction pénale. Certes, le droit pénal a pour objet de lutter contre la malhonnêteté et de sanctionner les manquements au devoir de probité incombant aux agents publics, alors que le droit public financier et la discipline budgétaire et financière ont pour objet de protéger l’argent public, dans un but d’intérêt général. Mais, le régime de responsabilité financière mis en œuvre par le Conseil de Discipline Budgétaire et Financière, qui couvre un champ assez vaste, constitue des éléments importants dans le système global de protection des finances publiques, lequel englobe les infractions pénales. En effet, l’existence des règles spécifiques constitue un moyen pour éviter en amont, que des fraudes puissent être commises par le biais des procédures et des contrôles particuliers. Le fait que le non respect de ces règles soit sanctionné, y compris dans des cas dans lesquels la juridiction répressive ne peut être saisie, représente à cet égard une garantie de sécurité supplémentaire.

L’article 3 du code pénal camerounais disposant que nulle contravention, nul délit, nul crime ne peuvent être punis de peines qui n’étaient pas prononcés par la loi avant qu’ils fussent commis, les fautes de gestion ayant une connotation pénale sont prévues dans l’AUSGIE , et réprimées par la loi n° 2003/008 du 10 juillet 2003 portant répression des infractions contenues dans certains actes uniformes OHADA.

B. Les irrégularités retenues à l’encontre des commissaires aux comptes auprès des sociétés publiques et para publiques, par les instances compétentes

Rentrent dans cette rubrique la violation des incompatibilités légales(a), la certification des états financiers mensongers(b), et la non révélation des faits délictueux (c).

1. La violation des incompatibilités légales

L’inventaire des textes relatifs à cette faute de gestion ou infraction, précédera ses applications concrètes par les organes chargées de sa sanction

a. La législation relative à la violation des incompatibilités légales

Le Commissaire aux comptes étant au cœur de la sécurisation de l’information financière, son indépendance est la clé de voûte de son métier .Défini par PRAT dit HAUD comme la capacité de l’auditeur à résister aux pressions extérieures de toute nature pour assurer aux tiers le respect des normes comptables ,cette indépendance est d’autant plus indispensable qu’il est rémunéré pour critiquer éventuellement ceux qui l’ont désigné. Aussi, une attitude de subordination serait-elle plus dangereuse pour les parties prenantes, que l’absence de tout contrôle.

Il peut pourtant arriver que ce professionnel soit sollicité par son client dans certains domaines. Or, s’il lui vend des missions se rapprochant de sa fonction de certification, sa notoriété devient un outil de promotion, impliquant de sa part la nécessité d’éviter des remarques nuisibles. En outre, la relation résultant de l’exécution de telles missions s’approche d’une relation commerciale qui, par essence, n’est pas de nature à garantir l’indépendance, le risque étant de passer d’une relation auditeur- audité, à celle de client- fournisseur. Dans une telle situation, l’opinion est transgressée, guidée par la volonté du donneur de mandat, généralement le Directeur Général de la structure, laquelle n’est pas dénuée de toute motivation. Cette double relation crée également un risque de dépendance financière de la part de ce professionnel, de telles activités ayant généralement une rentabilité plus forte. Dans de telles conditions, l’on peut craindre que, pour protéger ces revenus complémentaires, le commissaire aux comptes ne se soumette aux demandes du client , et que son activité principale ne soit considérée comme un produit d’appel pour vendre les missions connexes , réputées plus juteuses.

En vue de protéger cette indépendance garante d’une bonne certification et de la qualité de l’audit, le législateur OHADA a dressé des prohibitions sous forme d’incompatibilité , à l’article 697 de l’AUSGIE qui énonce : « les fonctions des commissaires aux comptes sont incompatibles avec tout acte de nature à porter atteinte à son indépendance …….. ». Cette disposition est reprise par l’article13 de la loi n° 99-016 du 22 décembre 1999,en ces termes : « les fonctions des Commissaires aux comptes sont incompatibles d’abord avec toute activité ou tout acte de nature à porter atteinte à son indépendance, et avec toute autre fonction ou emploi rémunéré, même ponctuellement au sein de l’entreprise concernée. »

Les articles 29, 30,31 de la loi n° 2011-009- de mai 2011 relative à l’exercice de la profession comptable libérale et au fonctionnement de l’ordre national des experts comptables du Cameroun, énumèrent également les activités incompatibles.

b. Les applications concrètes de la violation des incompatibilités légales

i.par le Conseil de Discipline Budgétaire et Financière
Le commissaire aux comptes devant conserver une attitude d’esprit lui permettant d’effectuer sa mission avec intégrité et objectivité , c’est à juste titre que l’élaboration d’un manuel de procédures au profit du MATGENIE , et l’exercice de la fonction d’assistant comptable ayant induit un préjudice financier, résultant de l’exercice d’activités incompatibles , ont été retenues à l’encontre du cabinet WAC Fiduciaire Comptable, commissaire aux comptes auprès de l’entité sus citée, par le Conseil de Discipline Budgétaire et Financière .

Dans l’affaire SODECOTON, les fautes de gestion retenues à la charge des cabinets Cameroun audit Conseil (CAC) et Experts Comptables Associés (ECA), au titre de l’exercice des activités incompatibles par l’instance disciplinaire sus citée , concernaient :

  • la signature par le Cabinet CAC d’un contrat d’assistance fiscale avec la SODECOTON
  • l’administration d’une formation en contrĂ´le de gestion par le Cabinet CAC ; – l’administration d’une formation en fiscalitĂ© et Ă©mission d’opinions lĂ©gales par le Cabinet ECA. Cette position du Conseil de Discipline BudgĂ©taire et Financière est parfaitement justifiĂ©e. En effet, lorsque le commissaire aux comptes exerçant comme personne physique ou morale joue Ă©galement le rĂ´le d’assistant comptable, chargĂ© d’établir les Ă©tats financiers, la mission d’audit devient inefficace, l’intĂ©ressĂ©, en situation de conflits d’intĂ©rĂŞt, devenant juge et partie. Dans de telles conditions, le contrĂ´le exercĂ© ne peut qu’être illusoire. Si certains cas d’incompatibilitĂ©, relevĂ©s par l’instance sus- citĂ©e sont avĂ©rĂ©s, d’autres par contre suscitent des interrogations. En nous appuyant sur les textes rĂ©gissant l’exercice de cette profession, comme base d’élĂ©ments permettant de dĂ©terminer le caractère compatible ou non des missions exĂ©cutĂ©es par les sociĂ©tĂ©s de commissariat aux comptes, l’on relève l’exclusion de la fonction d’enseignement de ce champ de compĂ©tence .Le Conseil de Discipline BudgĂ©taire et Financière, en l’intĂ©grant parmi les activitĂ©s interdites, a fait une interprĂ©tation excessive de la notion d’incompatibilitĂ©. Dans les cas d’espèce, les Cabinet CAC et ECA avaient administrĂ© des formations en contrĂ´le de gestion, en fiscalitĂ© et Ă©mission d’opinions lĂ©gales, Ă  certains personnels de la SODECOTON. Une telle extension est difficilement admissible car, l’accomplissement de cette mission ne remettait nullement en cause l’indĂ©pendance de ces cabinets, dans l’exercice de leur mission lĂ©gale. En outre, les travaux ayant Ă©tĂ© effectivement rĂ©alisĂ©s, la contrepartie reçue Ă©tait par consĂ©quent justifiĂ©e. ii.par le juge repressif Sur le plan pĂ©nal, dans l’affaire Ministère Public et SociĂ©tĂ© Immobilière du Cameroun(SIC )contre Gilles Roger Belinga et consorts , les commissaires aux comptes qui avaient sollicitĂ© et obtenu du PrĂ©sident du Conseil d’Administration de l’entitĂ© par eux contrĂ´lĂ©e, qu’il leur soit accordĂ© exceptionnellement les mĂŞmes avantages que ceux des administrateurs en matière des acquisitions de logement, avaient Ă©tĂ© reconnus par le tribunal de Grande Instance du Mfoundi(TGI) statuant en matière criminelle, coupables d’avoir agi en violation des incompatibilitĂ©s lĂ©gales , la requĂŞte ayant abouti aux ventes critiquĂ©es. Le mĂŞme grief avait Ă©tĂ© retenu Ă  leur encontre par la juridiction de cĂ©ans, s’agissant du dĂ©tournement de deniers publics de 160.000.000 FCFA, suite Ă  des attributions frauduleuses de marchĂ©s. Par contre dans l’affaire Ministère public et crĂ©dit foncier du Cameroun contre BOOTO A NGON et autres, la mĂŞme juridiction , avait dĂ©clarĂ© le commissaire aux comptes auprès de ladite structure, non coupable de violation des incompatibilitĂ©s lĂ©gales, dans l’accomplissement des travaux complĂ©mentaires , lesquelles cadraient parfaitement avec les opĂ©rations dites compatibles avec l’exercice de son mandat, en ce qu’il s’agissait d’émission d’avis sur la conformitĂ© avec les lois et règlements ,et sur les modalitĂ©s de comptabilisation des opĂ©rations. 2. la Certification des Ă©tats financiers mensongers La mission du commissaire aux comptes est de certifier en justifiant de leurs apprĂ©ciations, que les comptes annuels des entitĂ©s contrĂ´lĂ©es sont rĂ©guliers , sincères , et donnent une image fidèle de la sociĂ©tĂ©. Cette mission de certification est une des diligences traditionnelles de ce professionnel, dont le principe de la rĂ©gularitĂ© est le fondement intellectuel. La certification des Ă©tats financiers est par consĂ©quent l’expression d’une opinion qualifiĂ©e .Techniquement, elle est assortie d’observations qui permettent de supplĂ©er aux insuffisances d’informations du rapport que les dirigeants font Ă  leurs associĂ©s. Pour former son opinion, le commissaire aux comptes procède Ă  un audit, avec pour objectif d’obtenir l’assurance raisonnable que les comptes ne comportent pas d’anomalies significatives. Dans ce processus, il prend en compte la notion de risque, procède Ă  des analyses juridiques et de conformitĂ© avec les principes comptables. Il s’agit d’un art difficile, compte tenu des exigences du lĂ©gislateur en la matière. A la fin de sa mission, il pourra certifier les comptes sans rĂ©serve , avec rĂ©serve , ou refuser la certification. D’une manière gĂ©nĂ©rale, l’irrĂ©gularitĂ© de gestion rĂ©sultant de la certification des Ă©tats financiers, trouve sa raison d’être dans l’idĂ©e que le contrĂ´le serait vidĂ© de son utilitĂ©, si les contrĂ´leurs lĂ©gaux pouvaient impunĂ©ment donner des informations mensongères au regard des connaissances acquises, lors des opĂ©rations de contrĂ´le et de vĂ©rification. C’est la teneur du rapport du commissaire aux comptes qui doit ĂŞtre apprĂ©ciĂ© en Ă©valuant la pertinence de la certification accordĂ©e , et les observations Ă©ventuellement formulĂ©es .Dans un second temps, et si l’information dĂ©livrĂ©e dans le rapport apparait fausse ou Ă  tout le moins trompeuse , l’on examine si , sur la base d’un niveau de diligence conforme Ă  ses obligations professionnelles, il aurait dĂ» prendre conscience du caractère faux ou trompeur des informations certifiĂ©es. L’irrĂ©gularitĂ© de gestion retenue Ă  l’encontre du cabinet WAC FIDUCIAIRE COMPTABLE, commissaire aux comptes auprès du MATGENIE, par le Conseil de Discipline BudgĂ©taire et Financière, Ă©tait relative Ă  la certification d’états financiers erronĂ©s de 2007 Ă  2009, en violation de l’acte uniforme OHADA, Ă  travers entre autres :
  • l’inexistence de documents financiers lĂ©gaux, la pratique non conforme de l’amortissement, la non-conformitĂ© des comptes intermĂ©diaires de gestion ;
  • la non justification de la rĂ©Ă©valuation de nombreuses immobilisations, d’un montant de 9 105 051 568 FCFA ;
    les différences observées entre la valeur des immobilisations contenues dans le bilan consolidé et celles contenues dans le tableau d’amortissement ;
  • la constatation des provisions sans pièces justificatives de crĂ©ance ;
  • la constatation de provision lors de l’exercice 2009 sur les chèques Ă  encaisser sans la preuve de leur existence rĂ©elle en portefeuille ;
  • la confection et la reproduction irrĂ©gulière d’états financiers par le commissariat aux comptes. A l’analyse des griefs relevĂ©s, on se rend compte que le dossier d’audit contenait d’importantes nĂ©gligences et lacunes, et aurait dĂ» mettre ce professionnel dans l’impossibilitĂ© d’obtenir une opinion significative sur l’authenticitĂ© globale des Ă©tats financiers. Pour n’avoir pas attirĂ© l’attention des parties prenantes sur lesdites anomalies, le lien de causalitĂ© entre la faute commise et le prĂ©judice subi ne faisait l’objet d’aucun doute. 3. La non rĂ©vĂ©lation des faits dĂ©lictueux Il s’agit d’un des aspects les plus dĂ©licats de la mission de commissaire aux comptes, qui devrait se faire dĂ©lateur, conformĂ©ment aux dispositions de l’article 899 de l’AUSGIE. Une telle dĂ©nonciation peut paraĂ®tre choquante car, il peut sembler, comme le souligne B.BOULOC, anormal qu’une personne qui n’est ni une autoritĂ©, ni un officier public, ni un fonctionnaire, soit tenu de dĂ©noncer des faits dĂ©lictueux, sous peine de se rendre coupable d’un dĂ©lit. Mais, selon Y.GUYON, « bien que critiquĂ©e par certains, l’obligation de dĂ©nonciation paraĂ®t opportune, du moment qu’elle est entendue de manière raisonnable, et qu’elle s’accompagne de relations confiantes entre les commissaires aux comptes et les magistrats de parquet. Elle peut renforcer notamment l’autoritĂ© du commissaire aux comptes Ă  l’égard des dirigeants, en faisant prendre au sĂ©rieux les observations qu’il formule, au cas oĂą il lui apparait qu’un dĂ©lit, sur le point d’être commis, peut encore ĂŞtre Ă©vitĂ©. » Si l’obligation de dĂ©nonciation peut ĂŞtre considĂ©rĂ© comme la meilleure garantie qui puisse ĂŞtre donnĂ©e aux actionnaires, du sĂ©rieux dans lequel il est procĂ©dĂ© aux opĂ©rations de contrĂ´le, il convient de relever cependant que, par sa gĂ©nĂ©ralitĂ©, cette formule parait faire du commissaire aux comptes un dĂ©nonciateur officiel et nĂ©cessaire de tout ce qui pourrait se commettre de dĂ©lictueux dans l’entreprise. Elle est d’autant plus dangereuse qu’elle est vague, et peut, sur le plan pĂ©nal, susciter des interrogations sur la nature des faits Ă  dĂ©noncer, et leur qualification. En tout Ă©tat de cause, l’obligation pesant sur ce professionnel n’est pas une obligation de rĂ©sultat car, il n’est pas tenu de procĂ©der Ă  une recherche active de l’information, mais de dĂ©noncer toute infraction en matière du droit des sociĂ©tĂ©s, du droit comptable, fiscal, et social , que sa situation privilĂ©giĂ©e lui permet de dĂ©couvrir. Dans l’affaire SODECOTON, il Ă©tait reprochĂ© par le Conseil de Discipline BudgĂ©taire et Financière, aux sociĂ©tĂ©s de commissariat aux comptes auprès de cette entitĂ©, la non dĂ©nonciation de la tenue irrĂ©gulière de comptabilitĂ©, caractĂ©risĂ©e par la minoration du chiffre d’affaires Ă  travers la dissimulation des recettes provenant de : a. la vente de tourteaux ayant causĂ© un prĂ©judice financier Ă©valuĂ© Ă  1360 902 379 FCFA ; b. la vente d’huile ayant induit un prĂ©judice financier Ă©valuĂ© Ă  1500195782 FCFA ; c. des ristournes accordĂ©es sans l’aval de l’AssemblĂ©e GĂ©nĂ©rale ayant gĂ©nĂ©rĂ© un prĂ©judice financier Ă©valuĂ© Ă  1509871966 FCFA. Les sociĂ©tĂ©s de commissariat aux comptes, Co commissaires aux comptes auprès de la SociĂ©tĂ© Nationale de Raffinage (SONARA), s’étaient vus pour leur part, reprocher l’absence de dĂ©nonciation du non-respect des obligations de performance contenue en annexe C du contrat de contrĂ´le et d’inspection de pĂ©trole brut liant la SONARA au ContrĂ´leur agrĂ©e , la faiblesse du système de contrĂ´le interne dans le domaine de la production, ayant induit la certification d’états financiers non sincères ; la violation d’une convention rĂ©glementĂ©e Ă  travers la signature ou le renouvellement des contrats des personnels expatriĂ©s sans demande prĂ©alable de la SONARA. Dans les deux cas, le prĂ©judice subi par la puissance publique Ă©tait avĂ©rĂ©. Il ressort de ces dĂ©veloppements que les fautes de gestion retenues Ă  l’encontre des commissaires aux comptes dans les cas sus citĂ©s, qui ne procĂ©daient pas de simples nĂ©gligences, devraient amener l’homme du chiffre exerçant auprès d’une entreprise publique Ă  ĂŞtre dĂ©sormais plus vigilant, d’autant plus qu’il peut ĂŞtre sanctionnĂ© non seulement sur le plan rĂ©pressif, mais de la discipline budgĂ©taire et financière, pour la mĂŞme faute. Il convient Ă  prĂ©sent de s’interroger sur les modalitĂ©s de la sanction.

2ème partie : Les modalités de la sanction des fautes commises par les commissaires aux comptes

Le texte à la base de la sanction sur le plan de la discipline budgétaire et financière est l’article 1er de la loi n° 74/18 du 5 décembre 1974 relative au contrôle des Ordonnateurs, gestionnaires et gérants de crédits publics et des entreprises d’Etat telle que modifiée par la loi n° 76/4 du 8 juillet 1976, qui reconnait à l’instance suscitée la compétence pour connaitre des irrégularités commises par tout agent de l’Etat, d’une collectivité publique locale, d’un établissement ou d’un organisme public ou parapublic ayant la qualité d’administrateur de crédits, tout commissaire aux comptes, censeur ou commissaire de gouvernement auprès d’une entreprise d’Etat quel qu’en soit le statut.

Le commissaire aux comptes étant, comme toute personne, sujet de droit, sa responsabilité pénale peut être engagée à l’occasion des fautes commises dans le cadre de l’exercice de ses fonctions. Il convient dès lors de s’interroger sur l’étendue de la responsabilité de ce professionnel, surtout lorsqu’il agit dans le cadre d’une société de commissariat aux comptes (A), avant de nous appesantir sur la peine encourue (B).

A. La détermination de la responsabilité des commissaires aux comptes

Le commissaire aux comptes peut choisir d’exercer son activité en tant qu’entité personne physique ou morale.
Lorsque la fonction est exercée par la personne physique, le problème de responsabilité personnelle ne se pose pas, l’intéressé étant appelé à répondre des actes qu’il pose. Lorsqu’elle est exercée en société, la question se pose de savoir qui de la personne morale ou physique, répondra des faits, sur le plan de la discipline budgétaire et financière.

Si, d’un point de vue contractuel, il n’est possible d’engager que la responsabilité de celui avec lequel le contrat a été conclu, l’action contractuelle restant en effet limitée entre les parties, la situation n’est pas la même, en présence d’une réglementation explicite, laquelle donne à cette fonction un caractère institutionnel .

1.Les textes applicables en la matière
La loi n° 2011-09 du 6 mai 2011 relative à l’exercice de la profession comptable libérale précitée dispose en son article 28 : « la responsabilité des sociétés reconnues par les autorités compétentes, laisse subsister la responsabilité personnelle de chaque membre à l’égard des autorités, à raison des travaux qu’il est amené à exécuter, pour le compte des sociétés .Ces travaux doivent être assortis de sa signature ainsi que de sa raison sociale. »

L’article 7 de la même loi précise : « le commissaire aux comptes est civilement responsable tant à l’égard de la société que des tiers, des conséquences dommageables des fautes et négligences qu’il commet dans l’exercice de ses fonctions. » Cette disposition est reprise par les articles 14 et 44 du règlement CEMAC .

Enfin, la loi n° 74/18 du 5 décembre 1974 relative à la sanction des ordonnateurs, gestionnaires et gérants de crédits publics et des entreprises d’Etat telle que modifiée par la loi n° 76/4 du 8 juillet 1976 énonce en son article 1 er : « tout agent de l’Etat, d’une collectivité publique locale, d’un établissement ou organisme public ou parapublic ayant la qualité d’administrateur de crédits, tout commissaire aux comptes, censeur ou commissaire de gouvernement auprès d’une entreprise d’Etat quel qu’en soit le statut, qui se rend coupable d’une des irrégularités. »

Des deux premiers textes, on peut induire que le commissaire aux comptes qui exerce ses fonctions au sein d’une société est également responsable des conséquences dommageables de ses fautes professionnelles.

Le troisième texte quant à lui, reconnait la compétence du Conseil de Discipline Budgétaire et Financière pour juger exclusivement le commissaire aux comptes, et non la société de commissariat aux comptes, dûment représentée.

Il apparait donc que la fonction de commissariat aux comptes étant dominée par la personne physique dont les prestations au sein de la société sont intellectuelles, et requérant la justification d’une certaine compétence en matière financière ou comptable , le professionnel l’exerçant doit répondre de ses actes.

Sur un autre angle, tout rapport émanant d’une société de commissariat aux comptes, doit comporter la signature du commissaire ayant participé à son établissement. Or cette signature, en plus de celle de la société titulaire du mandat, n’est pas seulement une signature technique à usage professionnel. Enfin, le système répressif du droit public financier camerounais ayant pour but de sanctionner des fautes, les principes généraux de droit répressif s’appliquent de façon adaptée à la nature de la répression spécifique au Conseil de Discipline Budgétaire et Financière, dont l’objectif est de réprimer un comportement individuel, ce qui explique que ce soit le commissaire aux comptes , personne physique, et non la personne morale dûment représentée, qui est justiciable devant l’instance y relative.

Sur la base de ces développements, l’on peut conclure que le législateur a voulu personnaliser clairement les obligations légales du commissaire aux comptes, et responsabiliser les signataires des rapports, en permettant qu’ils répondent des fautes commises. Cette solution est d’autant plus logique que ce professionnel a eu une connaissance suffisante de la situation de l’entreprise dans le cadre de l’exercice de sa mission, et a assumé les décisions les plus significatives.

Cette position du législateur camerounais est du reste celle en vigueur en France, où la Cour de Cassation , dans un arrêt rendu le 11 juillet 2006, affirmait déjà : « le commissaire aux comptes certifiant les comptes au nom de la société de commissariat aux comptes dont il est membre, agit en qualité d’associé, d’actionnaire ou de dirigeant de cette société, non en qualité de salarié de celle-ci, peu important qu’il soit lié à la société de commissariat aux comptes par un contrat de travail » .

Dans une autre décision en date du 23 mars 2010, elle a confirmé sa position en ces termes : « …..Mais le commissaire aux comptes agissant en qualité d’associé, d’actionnaire ou de dirigeant d’une société titulaire d’un mandat de commissaire aux comptes répond personnellement des actes professionnels qu’il accomplit au nom de cette société, quelle qu’en soit la forme …. »

2.La position du Conseil de Discipline Budgétaire et Financière

Malgré la clarté des textes sus évoqués, le Conseil de Discipline Budgétaire et Financière statuant dans les affaires sus citées, a choisi de ramer à contrecourant. Prenant acte de ce que « les commissaires personnes physiques n’étaient que les représentants des personnes morales, agissant sur la base de leur personnalité juridique propre, distincte de celle des personnes physiques mandatées par elles respectivement, dans le cadre des affaires relevant de l’exercice de ces fonctions » , cette instance a retenu les fautes de gestion exclusivement à l’encontre des personnes morales représentées par les personnes physiques.

Dans l’affaire MATGENIE, la décision est ainsi libellée : « le Conseil de Discipline Budgétaire et Financière a retenu à l’encontre du cabinet WAC FIDUCIAIRE COMPTABLE, commissaire aux comptes auprès du Mat génie, représenté par monsieur NKAMEDJO NYA Robert, les fautes de gestion ci-après………… »

Dans l’affaire SONARA, « le Conseil de Discipline Budgétaire et Financière a retenu à l’encontre de messieurs René LIBONG et Daniel KAPSSU, Co commissaires aux comptes auprès de la société de raffinage représentant les cabinets K.P.M.G et K et cgnie, les fautes de gestion ci-après…. »
La même formulation a été utilisée en ce qui concerne les commissaires aux comptes impliqués dans l’affaire SODECOTON.

Il ressort de toutes ces décisions que le Conseil de Discipline Budgétaire et Financière a choisi de mettre en cause tantôt de manière exclusive, tantôt par le biais de ses représentants, la responsabilité de la personne morale, en opérant une distinction entre le signataire social et le signataire technique du rapport. L’on peut dès lors en déduire que le mandataire social apposant sa signature au bas du rapport, accomplit un acte dont il ne doit pas répondre.

Or, S’il n’est pas contesté qu’une société de commissariat aux comptes a une personnalité juridique , il convient de reconnaitre qu’elle n’accomplit les actes de la profession que par l’intermédiaire des personnes physiques qui en sont membres, et qui doivent être des commissaires aux comptes, de sorte que les fautes commises dans l’exercice des missions confiées à la société, le sont en réalité par ces derniers.

Cette étrange logique de la responsabilité exclusive de la société commerciale, être totalement désincarné , qui trouve en son organe ou en son représentant l’expression physique et morale dont elle a besoin pour fonctionner, suscite des interrogations, en ce qu’elle constitue une violation manifeste des textes aussi clairs et catégoriques. Elle est d’autant plus incompréhensible que la faute de gestion , dans ce contexte, est un manquement aux obligations professionnelles des agents, engageant les finances publiques , et cette instance, dans le cadre de ses attributions, est obligée de rechercher si la personne physique, qui a trébuché sur la réglementation, n’était pas dans une situation telle que la chute était inévitable. En attendant la position de la Chambre Administrative de la Cour Suprême, saisie en appel par les justiciables, cette situation inconfortable, a des conséquences fâcheuses en termes de protection de la fortune publique.

Sur le plan de la responsabilité pénale, le professionnel agissant pour le compte de la personne morale, peut être sanctionné, dès lors que les éléments constitutifs de l’infraction sont réunis.

B. Les différentes sanctions prononcées à l’encontre des commissaires aux comptes

Lorsqu’à l’issue de l’instruction d’une affaire, la faute de gestion est établie, la loi n° 74/18 du 5 décembre 1974 relative à la sanction des ordonnateurs, gestionnaires et gérants de crédits publics et des entreprises d’Etat telle que modifiée par la loi n° 76/4 du 8 juillet 1976, autorise l’instance compétente à prononcer des amendes spéciales et des débets .

Sur la base de la distinction de la personnalité juridique de la personne morale et de la personne physique, la réparation du préjudice subi par la puissance publique évalué par le Conseil de Discipline Budgétaire et Financière, a été, dans les cas sus mentionnés, mis exclusivement à la charge de la personne morale .Certes, l’on peut comprendre que cette position soit guidée par le fait que la personne morale est réputée plus solvable. Mais, cette position, outre le fait qu’elle est en contradiction avec l’article 3 de la loi de 1974 précitée qui tient pour responsable les personnes physiques, peut prêter à conséquence, dès lors que le patrimoine de la société, constitué de la somme minimale requise par le législateur OHADA , s’avère insuffisant pour réparer le préjudice subi.

Sur le plan pénal, l’infraction au devoir de vérité , prévu à l’article 110 de la loi de 1999, est ainsi libellé : « est punie des peines prévues à l’article 313 du code pénal, le commissaire aux comptes d’une entreprise qui a sciemment donné, certifié ou confirmé des informations mensongères sur la situation de ladite entreprise, ou qui n’a pas porté à la connaissance des organes compétents les faits délictueux dont il a eu connaissance. »
L’infraction suppose donc qu’il y ait la communication d’informations concernant la société, et que l’information, en rapport avec la mission de commissaire aux comptes, soit mensongère. En pratique, le rapport de certification constitue le vecteur privilégié du mensonge .

L’action publique se prescrit par trois ans, et le délai commence à courir du jour où l’information incriminée a été donnée ou confirmée par le commissaire aux comptes. Le point de départ pour la computation du délai de prescription est fixé au jour de la commission du fait infractionnel.

Dans l’affaire crédit foncier précitée par exemple, les états financiers de cette structure dont la sincérité était remise en cause étant ceux des exercices 97-98, 98-99, 99-2000, 2000-2001. Ces faits avaient été découverts et révélés par la mission conjointe MINEFI /Contrôle supérieur de l’Etat, sur le contrôle général de la gestion du Crédit Foncier du Cameroun effectué de mai à décembre 2002. L’irrecevabilité de l’action publique a été admise par la juridiction compétente parce que le début des poursuites à l’encontre du commissaire aux comptes ayant eu lieu en mars 2006, soit quatre années plus tard, la prescription était déjà acquise. La même remarque avait été faite en ce qui concerne la non révélation des faits délictueux.
En ce qui concerne la violation des incompatibilités légales, l’article 16 de la loi n° 2003/008 du 10/07/2003 portant répression des infractions contenues dans certains actes uniformes OHADA, réprime cette infraction d’un emprisonnement de 2 à 5 ans, et d’une amende de 200.000 à 5.000.00 FCFA , ou de l’une des deux peines. Dans l’affaire SIC cependant, ces incompatibilités recelant la fraude, ont été assimilés à des détournements de fonds publics, passible des peines prévues à l’article 184 du code pénal.

Conclusion

La judiciarisation du comportement des acteurs de la vie économique dans les sociétés modernes est une réalité incontournable .A cet égard, les pouvoirs publics et les individus affichent désormais une propension accrue à rechercher un responsable face à la survenance d’évènements défavorables. Le commissaire aux comptes n’échappe pas à cette règle .Exerçant une mission d’intérêt public comparée à juste titre au contrôle administratif exercé sur les services publics et les établissements publics par les autorités compétentes , la pression exercée sur lui, écartelé entre les entreprises qu’il contrôle et la justice qui lui demande d’être garant de l’ordre public économique est justifiée.

Face au risque important que présente l’entreprise publique pour ce professionnel des chiffres, matérialisé par la possibilité de répondre de ses actions devant le juge judiciaire et le Conseil de Discipline Budgétaire et Financière, Il faudrait donc, comme le soulignait René RICOL , qu’il prenne la mesure de la pression qui s’exerce sur lui et en tire les conséquences dans le cadre de l’exercice de ses fonctions, en termes de manifestation d’indépendance, surtout que, outre le patrimoine de la personne morale, le sien peut également être engagé pour la réparation du préjudice subi par la puissance publique.

Il reste à souhaiter que le Conseil de Discipline budgétaire et Financière, dans le cadre de ses activités, prenne la pleine mesure des textes législatifs en termes de compétence, de respect des incompatibilités, et de subsistance de la responsabilité personnelle du commissaire aux comptes exerçant ses fonctions dans le cadre d’une société, et en tire toutes les conséquences de droit.

Docteur DJILA Rose
Chargée de cours FSJP,
Université de DSCHANG, Cameroun

Revue de l’ERSUMA: Droit des affaires – Pratique Professionnelle, N° 6 – Janvier 2016, Etudes.

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