Guy Saturnin TSETSA
Magistrat                                                                                                   Â
Juge au Tribunal de Grande Instance dâOwando, R. Congo
INTRODUCTION
La saisie immobiliĂšre est une procĂ©dure permettant Ă un crĂ©ancier muni dâun titre exĂ©cutoire de poursuivre la vente dâun bien immobilier appartenant Ă son dĂ©biteur afin de se faire payer sur le prix de vente. Elle constitue lâultime recours du crĂ©ancier souvent excĂ©dĂ© par la dĂ©faillance de son dĂ©biteur , lorsque ce nâest pas le caractĂšre rĂ©calcitrant de ce dernier qui le contraint Ă sây rĂ©soudre pour obtenir, enfin, le paiement de sa crĂ©ance .
Pourtant, la mise en Ćuvre de cette procĂ©dure nâest pas toujours aisĂ©e, la saisie immobiliĂšre est une procĂ©dure trĂšs formaliste, complexe, onĂ©reuse et longue dont le succĂšs est tributaire de la maitrise des arcanes de la procĂ©dure, mais aussi de la dextĂ©ritĂ© de lâhuissier instrumentaire.
La saisie immobiliĂšre exige du poursuivant le respect dâun formalisme assez rigoureux dont lâinobservation devra anĂ©antir la procĂ©dure ainsi entreprise. Ce formalisme se dĂ©duit aisĂ©ment de lâarticle 246 de lâActe Uniforme portant Organisation des ProcĂ©dures SimplifiĂ©es de Recouvrement et des Voies dâExĂ©cution (AUVE) aux termes duquel « le crĂ©ancier ne peut faire vendre les immeubles appartenant Ă son dĂ©biteur quâen respectant les formalitĂ©s prescrites par les dispositions qui suivent. Toute convention contraire est nulle ». Ce texte doit ĂȘtre perçu comme une injonction faite au poursuivant de respecter les formalitĂ©s exigĂ©es dans la mise en Ćuvre de cette procĂ©dure. En dĂ©pit de cette obligation, il sied de noter que toutes les formalitĂ©s ne seront pas accomplies uniquement par le poursuivant, dâautres doivent ĂȘtre remplies par le saisi, le tiers dĂ©tenteur, lâadjudicataire, le surenchĂ©risseur, le greffier, voire le conservateur des hypothĂšques.
Pour prĂ©tendre satisfaire aux exigences de ce formalisme, le poursuivant doit Ă©tablir un calendrier des diligences Ă accomplir dĂšs le dĂ©clenchement de la procĂ©dure. Chaque formalitĂ© doit ĂȘtre accomplie dans un dĂ©lai prĂ©cis, dont lâinobservation sera sanctionnĂ©e par la dĂ©chĂ©ance. Le poursuivant doit se livrer Ă ce quâil convient dâappeler « une course contre la montre » pour tenir les dĂ©lais Ă©tant entendu que le non respect de dĂ©lai dans lâaccomplissement dâun seul acte peut avoir des consĂ©quences dĂ©sastreuses pour la suite de la procĂ©dure. Câest ce que souligne la doctrine en ces termes : « un des inconvĂ©nients de cette procĂ©dure (saisie immobiliĂšre) rĂ©sulte de ces dĂ©lais en cascade : lâinobservation de lâun dâeux emporte dĂ©chĂ©ance de lâacte et lâirrĂ©gularitĂ© se reporte sur les actes suivants et affecte de nullitĂ© toute la procĂ©dure ».
Le respect des dĂ©lais participe du renforcement du formalisme de cette voie dâexĂ©cution spĂ©cifique. Dâailleurs, lâon ne peut dissocier le respect des dĂ©lais du formalisme de la procĂ©dure, les deux concepts Ă©tant de notions limitrophes aux frontiĂšres mouvantes, se confondant par moment, et donnant Ă la saisie immobiliĂšre in fine, le visage bicĂ©phale de Janus.
La saisie immobiliĂšre exige dâobserver le formalisme qui jalonne chaque Ă©tape de la procĂ©dure, des incidents soulevĂ©s Ă la distribution du prix de lâimmeuble (II), la mĂȘme obligation pĂšse au demeurant sur chaque partie pouvant avoir des prĂ©tentions Ă faire valoir dans la procĂ©dure. LâĂ©tendue de cette exigence ne devra ĂȘtre comprise quâau regard des formalitĂ©s Ă accomplir (I)
I. De la saisie Ă la vente de lâimmeuble : les formalitĂ©s Ă remplir
La saisie immobiliĂšre exige du poursuivant lâaccomplissement des formalitĂ©s prescrites, Ă peine de nullitĂ©. Le poursuivant se doit dâaccomplir toute les formalitĂ©s dans lâordre Ă©tabli. En dĂ©pit du fait que la CCJA ait ratĂ© lâopportunitĂ© de se prononcer sur la question pour prescrire au poursuivant un calendrier Ă suivre dans lâaccomplissement des actes , il va de soi que dans lâaccomplissement de ces diffĂ©rentes formalitĂ©s, le poursuivant doit observer une certaine chronologie, dictĂ©e, elle-mĂȘme, par la nature intrinsĂšque des actes Ă accomplir dans la structuration globale de la procĂ©dure. Ce sera en effet, une curiositĂ© procĂ©durale que dâadmettre quâun acte soit accompli avant un autre alors que la validitĂ© du second acte est tributaire de la rĂ©gularitĂ© premier.
A- les formalitĂ©s relatives Ă la saisie de lâimmeuble
Certaines formalitĂ©s doivent ĂȘtre accomplies avant la tenue de lâaudience Ă©ventuelle, dâautres le seront postĂ©rieurement Ă celle-ci. NĂ©anmoins, certains prĂ©alables sont obligatoires pour le dĂ©clenchement de la procĂ©dure.
1) Les formalités préalables au déclenchement de la procédure
Au nombre des formalitĂ©s Ă accomplir avant le dĂ©clenchement de la procĂ©dure figurent lâimmatriculation prĂ©alable de lâimmeuble et la dĂ©livrance dâun pouvoir spĂ©cial Ă lâhuissier de justice instrumentaire.
a)- lâimmatriculation prĂ©alable de lâimmeuble Ă exproprier
DâemblĂ©e il importe de noter que seuls les immeubles immatriculĂ©s peuvent faire lâobjet dâune saisie immobiliĂšre. De ce fait, lorsque lâimmeuble Ă exproprier nâest pas immatriculĂ©, le poursuivant doit requĂ©rir lâimmatriculation prĂ©alable conformĂ©ment aux dispositions de lâarticle 253 de lâAUVE. Aux termes de cette disposition « si les immeubles devant faire lâobjet de la poursuite ne sont pas immatriculĂ©s et si la lĂ©gislation nationale prĂ©voit une telle immatriculation, le crĂ©ancier est tenu de requĂ©rir lâimmatriculation Ă la conservation fonciĂšre aprĂšs y avoir Ă©tĂ© autorisĂ© par dĂ©cision du prĂ©sident de la juridiction compĂ©tente de la situation des biens, rendue sur requĂȘte et non susceptible de recours ». Le second alinĂ©a ajoute, « quâĂ peine de nullitĂ©, le commandement visĂ© Ă lâarticle 254 ci-aprĂšs ne peut ĂȘtre signifiĂ© quâaprĂšs le dĂ©pĂŽt de la rĂ©quisition dâimmatriculation et la vente ne peut avoir lieu quâaprĂšs la dĂ©livrance du titre foncier ».
Pour ce faire, le poursuivant doit solliciter et obtenir du prĂ©sident du Tribunal de Grande Instance du lieu de la situation de lâimmeuble une ordonnance aux fins dâimmatriculation forcĂ©e de lâimmeuble Ă exproprier. Cette ordonnance, dit lâarticle 253 AUVE, est « insusceptible de recours ».
Le poursuivant doit solliciter lâimmatriculation de lâimmeuble non pas Ă son nom, mais au nom du dĂ©biteur conformĂ©ment Ă la lĂ©gislation nationale sur lâimmatriculation fonciĂšre. En droit positif congolais, lâimmatriculation est rĂ©gie par la loi de Finance n°17/2000 du 30 dĂ©cembre 2000 portant RĂ©gime de la PropriĂ©tĂ© FonciĂšre au Congo. Selon lâarticle 48 de ce texte, « en matiĂšre de saisie, la rĂ©quisition dâimmatriculation est Ă©tablie au nom du dĂ©biteur par le crĂ©ancier saisissant ou son reprĂ©sentant qui y joint la copie certifiĂ©e conforme du commandement aux fins de saisie immobiliĂšre. Il y joint Ă©galement tous les titres de propriĂ©tĂ©s, contrats, actes publics ou privĂ©s, documents quelconques de nature Ă faire connaitre les droits rĂ©els existants sur lâimmeuble et qui pourraient se trouver entre ses mains ».
La lecture combinĂ©e des dispositions des articles 253 de lâAUVE et 48 de loi prĂ©citĂ©e appelle quelques observations. Alors que lâAUVE indique que le commandement ne peut ĂȘtre signifiĂ© quâaprĂšs le dĂ©pĂŽt de la rĂ©quisition, la loi congolaise sur la propriĂ©tĂ© fonciĂšre fait obligation au poursuivant de joindre la copie certifiĂ©e conforme du commandement Ă la rĂ©quisition dâimmatriculation, ce qui, a priori, parait contradictoire. Pourtant, la contradiction nâest quâapparente, et pour cause, lâActe Uniforme ne sanctionne le commandement de nullitĂ© que sâil est signifiĂ© avant le dĂ©pĂŽt de la rĂ©quisition.
b)- la délivrance du pouvoir spécial aux fins de saisie immobiliÚre
Lâautre formalitĂ© Ă accomplir avant le dĂ©clenchement de la procĂ©dure proprement dite, est la dĂ©livrance du pouvoir spĂ©cial aux fins de saisie immobiliĂšre Ă lâhuissier de justice instrumentaire . La saisie immobiliĂšre Ă©tant une mesure lourde de consĂ©quence, la doctrine estime quâil nâest pas admis de prĂ©sumer le pouvoir donnĂ© Ă lâhuissier de justice sans la prĂ©sentation dâun acte matĂ©riel qui lui confĂšre le pouvoir de saisir. Câest donc ce pouvoir qui autorise lâHuissier de saisir la propriĂ©tĂ© immobiliĂšre de son dĂ©biteur, au nom et pour le compte du saisissant. Le dĂ©faut de ce pouvoir est sanctionnĂ© par la nullitĂ© de la procĂ©dure (Art. 254).
Ce pouvoir doit ĂȘtre signĂ© de la main du crĂ©ancier poursuivant ou de son mandataire, lâavocat poursuivant nâĂ©tant pas habilitĂ© Ă le dĂ©livrer. Sâagissant dâune saisie diligentĂ©e par une personne morale, il appartient Ă son reprĂ©sentant lĂ©gal de le dĂ©livrer. A ce sujet, il a Ă©tĂ© dĂ©cidĂ© quâĂ dĂ©faut dâavoir la qualitĂ© de directeur dâune sociĂ©tĂ© conformĂ©ment aux dispositions des articles 414 et suivants de lâAUSCGIE et faute de justifier dâun pouvoir spĂ©cial pour agir au nom de cette sociĂ©tĂ© comme le prĂ©voit lâarticle 254 AUVE, une personne ne peut dĂ©livrer un pouvoir aux fins de saisie immobiliĂšre au nom dâune sociĂ©tĂ© commerciale . Le pouvoir spĂ©cial peut ĂȘtre sous seing privĂ© ou sous la forme dâun acte authentique .
Le pouvoir spĂ©cial doit ĂȘtre dĂ©livrĂ© uniquement quâĂ lâhuissier de justice instrumentaire. Il sera dĂ©clarĂ© nul sâil a Ă©tĂ© libellĂ© au nom dâun huissier autre que lâhuissier de justice instrumentaire , Ă condition bien entendu de justifier dâun prĂ©judice. Ainsi dans lâaffaire ayant donnĂ© lieu Ă lâarrĂȘt du 9 mars 2006, pour rejeter le pourvoi rĂ©gularisĂ© par le dĂ©biteur, la CCJA a dĂ©cidĂ© entre autres que « les requĂ©rants ne justifiant pas de prĂ©judice par eux subis du fait de la dĂ©signation dâun autre huissier pour procĂ©der Ă la saisie, ne peuvent demander lâannulation du commandement » . Câest dire que mĂȘme lorsque lâirrĂ©gularitĂ© est avĂ©rĂ©e, conformĂ©ment Ă lâarticle 297 de lâAUVE, le plaideur qui entend obtenir lâannulation de lâacte de ce chef, doit justifier le prĂ©judice que lui aurait causĂ© ladite irrĂ©gularitĂ©.
2)-le déclenchement de la procédure
La saisie immobiliÚre débute par la signification du commandement de saisie, suivie du dépÎt de cahier des charges au greffe du tribunal.
a)- Le commandement aux fins de saisie immobiliĂšre
Le commandement aux fins de saisie immobiliĂšre est un acte dressĂ© par un huissier de justice. A cet effet, il est soumis aux dispositions rĂ©gissant les actes dâhuissier. Il doit contenir lâentĂȘte de lâhuissier instrumentaire, ĂȘtre datĂ©, signĂ© et contenir toutes les autres mentions utiles pour la validitĂ© de lâacte, ajoutĂ©es Ă cela les mentions obligatoires propres Ă la saisie immobiliĂšre . Il doit Ă©galement ĂȘtre enregistrĂ© conformĂ©ment aux dispositions des articles 61 et 100 du Code GĂ©nĂ©ral des ImpĂŽts, Ă peine de nullitĂ©.
Si le commandement aux fins de saisie est considĂ©rĂ© comme un acte dĂ©clencheur des poursuites, câest Ă cause des effets quâil produit dĂšs sa publication. A la vĂ©ritĂ©, le commandement non encore publiĂ© ne constitue quâun acte prĂ©alable Ă la saisie qui peut ĂȘtre assimilĂ© Ă une mise en demeure de payer les sommes rĂ©clamĂ©es dans un dĂ©lai de vingt (20) jours. DĂ©passĂ© ce dĂ©lai, ledit commandement sera publiĂ© Ă la Conservation des HypothĂšques et de la PropriĂ©tĂ© fonciĂšre et vaudra, Ă dater de cette publication, saisie rĂ©elle du bien immobilier du dĂ©biteur. Il sera prĂ©cisĂ© que si par extraordinaire, le dĂ©biteur qui a reçu signification du commandement sâavise Ă payer sa dette, les poursuites sâarrĂȘtent.
Lâhuissier de justice, personnage central dans la mise en Ćuvre de la saisie, doit accorder une attention soutenue Ă la rĂ©daction du commandement, tant il est vrai quâune nĂ©gligence avĂ©rĂ©e de sa part peut ĂȘtre constitutive dâune faute susceptible dâengager sa responsabilitĂ©
Le commandement aux fins de saisie immobiliĂšre est signifiĂ© au dĂ©biteur saisi ou au tiers dĂ©tenteur, le cas Ă©chĂ©ant, dans les conditions fixĂ©es par les articles 254 et 255 de lâAUVE. ConformĂ©ment aux dispositions de lâarticle 254, toute poursuite en vente forcĂ©e doit ĂȘtre prĂ©cĂ©dĂ©e dâun commandement aux fins de saisie lequel doit contenir Ă peine de nullitĂ© :
1) La reproduction ou la copie du titre exĂ©cutoire et le montant de la dette ainsi que les noms, prĂ©noms et adresses du crĂ©ancier et du dĂ©biteur et, sâil sâagit dâune personne morale, ses forme, dĂ©nomination et siĂšge social ;
2) La copie du pouvoir spĂ©cial de saisir donnĂ© Ă lâhuissier ou Ă lâagent dâexĂ©cution par le crĂ©ancier poursuivant, Ă moins que le commandement ne contienne, sur lâoriginal et la copie, le bon pour pouvoir signĂ© de ce dernier ;
3) Lâavertissement que, faute de payer dans les vingt (20) jours, le commandement pourra ĂȘtre transcrit Ă la conservation fonciĂšre et vaudra saisie Ă partir de sa publication ;
4) Lâindication de la juridiction oĂč lâexpropriation sera poursuivie ;
5) le numĂ©ro du titre foncier et lâindication de la situation prĂ©cise des immeubles faisant lâobjet de la poursuite ; sâil sâagit dâun immeuble non encore immatriculĂ©, le numĂ©ro de la rĂ©quisition dâimmatriculation ; et, sâil sâagit dâimpenses rĂ©alisĂ©es par le dĂ©biteur sur un terrain dont il nâest pas propriĂ©taire, mais qui lui a Ă©tĂ© affectĂ© par une dĂ©cision dâune autoritĂ© administrative, sa dĂ©signation prĂ©cise ainsi que la rĂ©fĂ©rence de la dĂ©cision dâaffectation ;
6) La constitution de lâavocat chez lequel le crĂ©ancier poursuivant Ă©lit domicile et oĂč devront ĂȘtre notifiĂ©s les actes dâopposition au commandement, offres rĂ©elles et toutes significations relatives Ă la saisie ».
Lorsque les poursuites sont dĂ©clenchĂ©es contre un tiers dĂ©tenteur, lâarticle 255 prĂ©cise quâĂ peine de nullitĂ©, le commandement est signifiĂ© le cas Ă©chĂ©ant au tiers dĂ©tenteur avec sommation, soit de payer lâintĂ©gralitĂ© de la dette en principal et intĂ©rĂȘts, soit enfin de subir la procĂ©dure dâexpropriation. Le dĂ©laissement se fait au greffe de la juridiction compĂ©tente de la situation des biens, il en est donnĂ© acte par celle-ci.
La signification à tiers détenteur vise à informer le tiers de la mesure de saisie en cours en vue de susciter les contestations éventuelles, bien entendu, lorsque le tiers détenteur a des prétentions à faire valoir.
1) -La publication du commandement
Peu aprĂšs la signification du commandement, le poursuivant doit procĂ©der Ă la formalitĂ© de la publication. Celle-ci sâeffectue par le dĂ©pĂŽt du commandement auprĂšs du conservateur des hypothĂšques lequel vise lâoriginal du commandement et Ă qui copie est remise pour la publication. Si le conservateur ou lâautoritĂ© administrative concernĂ©e ne peut procĂ©der Ă lâinscription du commandement Ă lâinstant, il fait mention sur lâoriginal qui lui est laissĂ© de la date et de lâheure du dĂ©pĂŽt(Art259) ;
Le conservateur procĂšde Ă la formalitĂ© de publication conformĂ©ment Ă lâarticle 71 de la loi sur la propriĂ©tĂ© fonciĂšre prĂ©citĂ©e. A partir de cette date, aucune inscription nouvelle ne peut ĂȘtre prise sur lâimmeuble pendant que la procĂ©dure suit son cours. En vertu de lâarticle 260 AUVE, les commandements prĂ©sentĂ©s postĂ©rieurement Ă la publication ne peuvent plus faire lâobjet dâune publication, ils seront simplement mentionnĂ©s en marge de celui dĂ©jĂ publiĂ© dans lâordre de prĂ©sentation avec les nom, prĂ©noms, domicile du nouveau poursuivant et lâindication de lâavocat constituĂ©. Le Conservateur des HypothĂšques constate Ă©galement, en marge et Ă la suite du commandement prĂ©sentĂ©, son refus de transcription et il mentionne chacun des commandements entiĂšrement transcrits ou mentionnĂ©s avec les indications qui y sont portĂ©es et celle de la juridiction oĂč la saisie est faite.
Il importe de relever que si aux termes de lâarticle 257 AUVE, lorsque la saisie porte sur plusieurs immeubles simultanĂ©ment, un seul commandement peut ĂȘtre Ă©tabli pour tous les immeubles, lâon peut utilement sâinterroger sur le mutisme du lĂ©gislateur OHADA sâagissant de la publication simultanĂ©e de plusieurs commandements portant sur le mĂȘme immeuble. Cette prĂ©occupation a retenu lâattention du lĂ©gislateur français lequel a prĂ©conisĂ© Ă lâarticle 20 du dĂ©cret du 27 juillet 2006 que « si la publication de plusieurs commandements valant saisie du mĂȘme immeuble est requise simultanĂ©ment, seul est publiĂ© le commandement qui mentionne le titre exĂ©cutoire portant la date la plus ancienne. Lorsque des titres portent la mĂȘme date, seul le commandement le plus ancien est publiĂ© ; si les commandements sont de la mĂȘme date, seul est publiĂ© celui dont la crĂ©ance en principal est la plus Ă©levĂ©e. » Avant la reforme intervenue en 2006, lâarticle 679 de lâancien code de procĂ©dure civile avait retenu une solution diffĂ©rente .
AprĂšs la publication du commandement, le dĂ©biteur ne peut aliĂ©ner lâimmeuble, ni le grever dâun droit rĂ©el ou des charges. En vertu de lâarticle 263 de lâActe Uniforme, les fruits naturels ou industriels, les loyers et fermages recueillis postĂ©rieurement au dĂ©pĂŽt du commandement ou le prix qui en provient sont, sauf lâeffet dâune saisie antĂ©rieure, immobilisĂ©s pour ĂȘtre distribuĂ©s avec le prix de lâimmeuble. Ils sont dĂ©posĂ©s, soit Ă la caisse des dĂ©pĂŽts et consignations, soit entre les mains dâun sĂ©questre dĂ©signĂ© par le prĂ©sident du tribunal compĂ©tent.
Le lĂ©gislateur OHADA fait remonter lâeffet de lâindisponibilitĂ© des biens attachĂ©s Ă la saisie non pas Ă la date de la publication effective du commandement, mais Ă la date du dĂ©pĂŽt du commandement. Or, le dĂ©pĂŽt du commandement Ă la conservation fonciĂšre nâimplique pas nĂ©cessairement sa publication, le conservateur des hypothĂšques Ă©tant investi du pouvoir de rejeter cette publication dĂšs lors que les conditions requises par la loi ne sont plus rĂ©unies. Une difficultĂ© peut alors surgir lorsque le poursuivant qui a obtenu la mise sous sĂ©questre des loyers gĂ©nĂ©rĂ©s par lâimmeuble Ă saisir aprĂšs le dĂ©pĂŽt du commandement Ă la conservation, a vu sa demande de publication rejetĂ©e par le conservateur dont la dĂ©cision est par la suite confirmĂ©e par une dĂ©cision de justice. Dans ces conditions, le dĂ©biteur peut utilement solliciter la mainlevĂ©e de la mesure de sĂ©questre en tirant argument de la dĂ©cision intervenue. Le lĂ©gislateur a voulu faciliter la mise sous main de justice des fruits gĂ©nĂ©rĂ©s par lâimmeuble Ă saisir pour Ă©viter que ceux-ci soient distraits par le saisi alors que la procĂ©dure est en cours.
Nonobstant cette indisponibilitĂ© de principe, force est de constater, en pratique, que le dĂ©biteur continue de percevoir les loyers et autres revenus gĂ©nĂ©rĂ©s par lâimmeuble saisi. Cela est dĂ» au fait que le poursuivant ne sollicite pas cette mesure. Il appartient donc au poursuivant de saisir le prĂ©sident du Tribunal de Grande Instance compĂ©tent dâune requĂȘte juste aprĂšs le dĂ©pĂŽt du commandement Ă la conservation sans attendre la publication effective de celui-ci.
2)-Le délai de la publication
Le commandement doit ĂȘtre publiĂ© dans un dĂ©lai de trois mois pour dater de la signification. Selon les dispositions de lâarticle 259 alinĂ©a 3 de lâAUVE, si un commandement nâa pas Ă©tĂ© dĂ©posĂ© au bureau de la conservation fonciĂšre ou Ă lâautoritĂ© administrative concernĂ©e dans les trois mois de la signification, puis effectivement publiĂ©, le crĂ©ancier ne peut reprendre les poursuites quâen les rĂ©itĂ©rant. Cette disposition imparti un dĂ©lai maximum de trois mois au poursuivant pour procĂ©der Ă la publication du commandement, faute de quoi, il devra rĂ©itĂ©rer son commandement, câest âĂ -dire, le renouveler. Il sâagit ici dâune hypothĂšse classique de la pĂ©remption du commandement connue en jurisprudence. En droit français, lâarticle 674 de lâancien code de procĂ©dure civile qui avait inspirĂ© le lĂ©gislateur OHADA fixait ce dĂ©lai Ă quatre-vingt âdix (90) jours. Depuis la reforme introduite par lâordonnance du 21 avril 2006 portant reforme de la saisie immobiliĂšre, ce dĂ©lai a Ă©tĂ© ramenĂ© Ă deux mois. En derniĂšre analyse, il importe dâindiquer que lâarticle 259 AUVE ne fixe quâune date butoir au delĂ de laquelle le commandement encourt la pĂ©remption. De ce fait, thĂ©oriquement, le poursuivant a toute latitude pour faire publier son commandement sans dĂ©lais aprĂšs la signification.
Par ailleurs, La lecture de lâarticle 254 alinĂ©a 3 de lâAUVE selon lequel le commandement contient Ă peine de nullitĂ© « lâavertissement que, faute de payer dans les vingt (20) jours, le commandement pourra ĂȘtre transcrit Ă la conservation fonciĂšre et vaudra saisie Ă partir de sa publication » peut laisser supposer que le lĂ©gislateur OHADA accorde un dĂ©lai de vingt (20) jours au poursuivant pour procĂ©der Ă la publication du commandement. Le dĂ©lai de vingt (20) jours indiquĂ© par ce texte nâest pas un dĂ©lai dâattente imposĂ© au poursuivant avant la publication du commandement, il sâagit plutĂŽt dâun dĂ©lai imparti au dĂ©biteur pour honorer sa dette . Le saisissant peut procĂ©der Ă la publication du commandement sans devoir attendre lâexpiration dudit dĂ©lai. Il peut mĂȘme procĂ©der Ă cette formalitĂ© le lendemain de la signification du commandement. Cependant, si le dĂ©biteur venait Ă honorer sa dette dans ce dĂ©lai, le poursuivant qui aurait fait publier le commandement devra supporter les frais pour obtenir sa radiation. Aussi est-il conseillĂ© dâattendre lâexpiration de ce dĂ©lai avant de procĂ©der Ă la publication.
b)- La rédaction du cahier des charges
Lâarticle 266 de lâAUVE dĂ©finit le cahier des charges comme un document rĂ©digĂ© et signĂ© par lâavocat du crĂ©ancier poursuivant qui prĂ©cise les conditions et modalitĂ©s de la vente de lâimmeuble saisi. Il est dĂ©posĂ© au greffe du Tribunal de Grande Instance dans le ressort duquel se trouve lâimmeuble dans un dĂ©lai maximum de cinquante (50) jours Ă compter de la publication du commandement Ă peine de dĂ©chĂ©ance. A peine de nullitĂ©, le cahier des charges contient les mentions suivantes :
1) lâintitulĂ© de lâacte ;
2) lâĂ©nonciation du titre exĂ©cutoire en vertu duquel les poursuites sont exercĂ©es contre le dĂ©biteur et du commandement avec la mention de sa publication ainsi que des autres actes et dĂ©cisions judiciaires intervenus postĂ©rieurement au commandement et qui ont Ă©tĂ© notifiĂ©s au crĂ©ancier poursuivant ;
3) lâindication de la juridiction ou du notaire convenu entre le poursuivant et le saisi devant qui lâadjudication est poursuivie ;
4) lâindication du lieu oĂč se tiendra lâaudience Ă©ventuelle prĂ©vue par lâarticle 270 ci aprĂšs ;
5) les nom, prénoms, profession, nationalité, date de naissance et domicile du créancier poursuivant ;
6) les nom, qualitĂ© et adresse de lâavocat poursuivant ;
7) la dĂ©signation de lâimmeuble saisi contenue dans le commandement ou le procĂšs verbal de description dressĂ© par lâhuissier ou lâagent dâexĂ©cution ;
8) les conditions de la vente et, notamment, les droits et obligations des vendeurs et adjudicataires, le rappel des frais de poursuite et toute condition particuliĂšre ;
9) le lotissement sâil y a lieu ;
10) la mise Ă prix fixĂ©e par le poursuivant, laquelle ne peut ĂȘtre infĂ©rieure au quart de la valeur vĂ©nale de lâimmeuble. La valeur de lâimmeuble doit ĂȘtre apprĂ©ciĂ©e, soit au regard de lâĂ©valuation faite par les parties lors de la conclusion de lâhypothĂšque conventionnelle, soit, Ă dĂ©faut, par comparaison avec les transactions portant sur des immeubles de nature et de situations semblables.
Au cahier des charges, est annexĂ© lâĂ©tat des droits rĂ©els inscrits sur lâimmeuble concernĂ© dĂ©livrĂ© par la conservation fonciĂšre Ă la date du commandement.
Les formalitĂ©s Ă©dictĂ©es par cette disposition Ă©tant prescrites Ă peine de nullitĂ©, la rĂ©daction du cahier des charges doit mobiliser lâattention de lâavocat poursuivant, lâomission de certaines mentions devra donner lieu Ă des contestations. NĂ©anmoins, mĂȘme en prĂ©sence dâune irrĂ©gularitĂ© avĂ©rĂ©e, le contestataire devra justifier dâun grief afin dâobtenir la nullitĂ© du cahier des charges de ce chef, puisquâen vertu de lâarticle 297 alinĂ©a 2, les formalitĂ©s prescrites par ce texte (Art.266) ne sont sanctionnĂ©es par la nullitĂ© que si lâirrĂ©gularitĂ© a eu pour effet de causer un prĂ©judice aux intĂ©rĂȘts de celui qui lâinvoque.
Il est permis de relever que le fait pour le poursuivant de ne pas avoir annexĂ© lâĂ©tat des droits rĂ©els inscrits sur lâimmeuble saisi dĂ©livrĂ© par la conservation fonciĂšre Ă la date de lâinscription du commandement nâemporte pas nullitĂ© du cahier des charges. En rĂ©alitĂ©, la sanction de la nullitĂ© prĂ©vue par cette disposition ne concerne que les dix premiers points du premier alinĂ©a, cette position a Ă©tĂ© rappelĂ©e par la CCJA dans un arrĂȘt dâune grande portĂ©e jurisprudentielle. MalgrĂ© cette jurisprudence, la question continue de nourrir les dĂ©bats dans les prĂ©toires des tribunaux. Ainsi dans une affaire soumise Ă lâapprĂ©ciation du Tribunal de Grande Instance (TGI) de Brazzaville, la dĂ©bitrice saisie soulevait la nullitĂ© du cahier des charges, motif pris de ce que le poursuivant avait omis dâannexer audit cahier, lâĂ©tat des droits rĂ©els inscrits sur lâimmeuble saisi dĂ©livrĂ© par la conservation fonciĂšre Ă la date de la publication du commandement. Sur le fondement de lâarticle 266 de lâAUVE, ce tribunal a dĂ©cidĂ© que « lâomission de lâannexion au cahier des charges, de lâĂ©tat des droits rĂ©els inscrits sur les immeubles saisis dĂ©livrĂ© par la conservation fonciĂšre Ă la date de la publication du commandement nâemporte pas nullitĂ© du cahier des charges » .
Si lâActe Uniforme dĂ©finit le cahier des charges comme un document prĂ©cisant les conditions et modalitĂ©s de la vente de lâimmeuble saisi, sa nature juridique est une question Ăąprement dĂ©battue par la doctrine avant que la jurisprudence y apporte une rĂ©ponse. Alors que certains considĂšrent le cahier des charges comme un simple projet contenant les clauses et conditions de la vente projetĂ©e , dâautres par contre estiment quâil constituait une convention ayant force exĂ©cutoire entre le saisissant, les crĂ©anciers, le saisi et lâadjudicataire . Cette derniĂšre conception a Ă©tĂ© approuvĂ©e par la DeuxiĂšme chambre de la Cour de Cassation . Pour respectable quâelle soit, cette conception est incomplĂšte Ă notre avis. En effet, avant la tenue de lâaudience Ă©ventuelle, le cahier des charges qui nâest quâun document prĂ©cisant les conditions et modalitĂ©s de la vente de lâimmeuble saisi, ne peut avoir un caractĂšre obligatoire pour les parties pour quâil puisse ĂȘtre assimilĂ© Ă une convention ayant force exĂ©cutoire dĂšs lors que certaines de ses clauses ont vocation Ă ĂȘtre modifiĂ©es ou supprimĂ©es par un dire ou par le tribunal dans lâexercice de son pouvoir de contrĂŽle sur les conditions de la vente projetĂ©e. De sorte que le cahier des charges nâacquiert vĂ©ritablement le caractĂšre conventionnel quâaprĂšs lâaudience Ă©ventuelle , la solution apportĂ©e aux contestations ainsi soulevĂ©es pouvant bouleverser substantiellement les conditions de la vente .
Cinquante (50) jours au plus tard aprĂšs la publication du commandement, le poursuivant est tenu de dĂ©poser le cahier des charges au greffe du Tribunal de Grande Instance du lieu de la situation de lâimmeuble. Ce dĂ©lai est prescrit Ă peine de dĂ©chĂ©ance (art.266 AUVE).
Contrairement Ă une certaine pratique qui consiste Ă dĂ©poser le cahier des charges au greffe aprĂšs le dĂ©pĂŽt du commandement Ă la conservation fonciĂšre sans devoir attendre la publication effective, en se complaisant de la seule mention « arrivĂ©e le 18 novembre 2013 » par exemple, apposĂ©e sur lâoriginal du commandement, lâarticle 266 de lâAUVE fait remonter le dies a quo pour la computation des dĂ©lais de cinquante (50) jours Ă la date de publication effective du commandement. En clair, câest la date de lâinscription du commandement au registre foncier qui marque le premier jour dans la computation des dĂ©lais. Or, en dĂ©posant le cahier des charges au greffe au vu de la date du dĂ©pĂŽt du commandement Ă la conservation, le saisi pourra soulever lâirrĂ©gularitĂ© de la procĂ©dure si lâinscription du commandement intervient postĂ©rieurement Ă la date du dĂ©pĂŽt du cahier des charges. Câest le sens du pourvoi rĂ©gularisĂ© par devant la CCJA dans lâaffaire ayant donnĂ© lieu Ă lâarrĂȘt du 15 juillet 2004 prĂ©citĂ© . Dans cette procĂ©dure le commandement avait Ă©tĂ© dĂ©posĂ© Ă la conservation fonciĂšre le 14 septembre 2000, celui-ci sera effectivement publiĂ© le 12 octobre 2000 alors que le cahier des charges avait Ă©tĂ© dĂ©posĂ© le 27 septembre 2000. Le demandeur au pourvoi sâestimait donc fondĂ© de solliciter la nullitĂ© des poursuites engagĂ©es aux motifs entre autres, que le cahier des charges avait Ă©tĂ© dĂ©posĂ© au greffe du tribunal antĂ©rieurement Ă la publication du commandement Ă la conservation fonciĂšre. RĂ©pondant Ă ce moyen, la CCJA a dĂ©cidĂ© dans un attendu aussi limpide que contestable, que « lâarticle 262, en son alinĂ©a 1er aux termes duquel en cas de non paiement, le commandement vaut saisie Ă compter de son inscription nâa pas pour objet de dĂ©terminer lâordre de lâaccomplissement des formalitĂ©s de la saisie immobiliĂšre, mais de prĂ©ciser le point de dĂ©part des effets du commandement Ă lâĂ©gard du dĂ©biteur saisi et de certains tiers quâil situe au jour oĂč celui-ci est publiĂ© ». Certains auteurs ont soulignĂ© pertinemment que la CCJA nâavait pas bien compris la prĂ©occupation du demandeur au pourvoi puisquâil ne sâagissait pas des formalitĂ©s au sens de lâarticle 297 alinĂ©a 2, mais plutĂŽt des dĂ©lais dont la sanction est la dĂ©chĂ©ance. Il va de soi que le saisissant doit respecter une certaine chronologie dans lâaccomplissement des formalitĂ©s.
c)- La sommation de prendre communication du cahier des charges
Le cahier des charges dĂ©posĂ© au greffe, le poursuivant doit sommer le saisi et les crĂ©anciers inscrits, le cas Ă©chĂ©ant, dâen prendre communication et dây insĂ©rer leurs dires. Cette sommation doit ĂȘtre faite Ă personne ou Ă domicile sâagissant du dĂ©biteur saisi, Ă domicile Ă©lu en ce qui concerne les crĂ©anciers inscrits (Art.269).
Il sâagit dâune obligation lĂ©gale Ă laquelle le poursuivant ne doit se soustraire sous aucun prĂ©texte. Cette exigence sâinscrit dans le souci de toucher les personnes intĂ©ressĂ©es par la saisie afin quâelles puissent faire valoir leurs moyens de dĂ©fenses dans la mesure oĂč lâexercice de leur action peut ĂȘtre de nature Ă anĂ©antir la procĂ©dure en cours , mais aussi dâĂ©viter des Ă©ventuelles contestations tirĂ©es du caractĂšre non contradictoire de la procĂ©dure ; encore faut-il que lâhuissier instrumentaire puisse servir ladite sommation Ă personne, Ă domicile ou Ă domicile Ă©lu. Car il est dĂ©jĂ arrivĂ© que lâhuissier instrumentaire puisse servir la sommation de prendre communication du cahier des charges Ă parquet ou Ă Mairie, en faisant sans doute un rapprochement insolite avec la citation Ă parquet ou Ă mairie. Le poursuivant, auteur de cette bourde peut toujours justifier son impĂ©ritie par le fait quâil est sans nouvelles de son dĂ©biteur dont il ignore dâailleurs le domicile, le saisi ayant dĂ©mĂ©nagĂ© de son prĂ©cĂ©dent domicile Ă la cloche de bois soit. Cependant en dĂ©pit de ces arguments, le lĂ©gislateur OHADA fait obligation au poursuivant de faire les diligences nĂ©cessaires pour servir la sommation Ă personne ou Ă domicile et cette disposition ne doit souffrir dâaucune entorse. Aussi a t-il Ă©tĂ© dĂ©cidĂ© que la sommation de prendre communication du cahier des charges doit ĂȘtre dĂ©clarĂ© nulle dĂšs lors que sa signification nâa pas Ă©tĂ© faite en la personne du dĂ©biteur, mais plutĂŽt Ă parquet, en la personne du Substitut du Procureur de la RĂ©publique au mĂ©pris des prescriptions de lâarticle 269 alinĂ©a 2 de lâAUVE .
Il est aussi arrivĂ© que le poursuivant fasse fi de lâobligation Ă lui faite de servir sommation au dĂ©biteur et se limite de dĂ©poser le cahier des charges au greffe, le saisi nâapprenant lâexistence de la procĂ©dure que par le biais du greffe lequel lui a notifiĂ© un avis dâaudience Ă laquelle Ă©tait jointe le cahier des charges !
La sommation de prendre communication du cahier des charges doit contenir certaines mentions. Aux termes de lâarticle 270 de lâAUVE, Cette sommation indique, Ă peine de nullitĂ© :
1) les jour et heure dâune audience dite Ă©ventuelle au cours de laquelle il sera statuĂ© sur les dires et observations qui auraient Ă©tĂ© formulĂ©s, cette audience ne pouvant avoir lieu moins de trente (30) jours aprĂšs la derniĂšre sommation ;
2) les jour et heure prĂ©vus pour lâadjudication qui doit avoir lieu entre le trentiĂšme et le soixantiĂšme jour aprĂšs lâaudience Ă©ventuelle ;
3) que les dires et observations seront reçus, Ă peine de dĂ©chĂ©ance jusquâau cinquiĂšme jour prĂ©cĂ©dant lâaudience Ă©ventuelle et quâĂ dĂ©faut de former et de faire mentionner Ă la suite du cahier des charges, dans ce mĂȘme dĂ©lai, la demande en rĂ©solution dâune vente antĂ©rieure ou la poursuite de folle enchĂšre dâune rĂ©alisation forcĂ©e antĂ©rieure, ils seront dĂ©chus Ă lâĂ©gard de lâadjudicataire de leur droit dâexercer ces actions.
Dans les huit (08) jours, au plus tard, aprĂšs le dĂ©pĂŽt du cahier des charges, le poursuivant doit servir au saisi et aux crĂ©anciers inscrits, sommation de prendre communication, au greffe, du cahier des charges et dây faire insĂ©rer leurs dires (art.269). Ce dĂ©lai aussi bref soit-il doit ĂȘtre respectĂ© par le poursuivant Ă©tant entendu que sa violation est sanctionnĂ©e par la dĂ©chĂ©ance (art.297 al.1). Le poursuivant doit faire toutes les diligences pour servir cette sommation au saisi dans les dĂ©lais prescrits mĂȘme lorsque ce dernier est domiciliĂ© hors du ressort du tribunal devant lequel le cahier des charges a Ă©tĂ© dĂ©posĂ©. La question reste posĂ©e dans lâhypothĂšse oĂč celui-ci est domiciliĂ© Ă lâĂ©tranger, les dispositions de lâarticle 39 du Code de procĂ©dure Civile, Commerciale, Administrative et FinanciĂšre ne pouvant sâappliquer en cette matiĂšre et lâActe Uniforme nâayant pas prĂ©vu de prorogation des dĂ©lais en raison des distances. Dans cette optique, le poursuivant devra faire preuve dâingĂ©niositĂ© afin de toucher le dĂ©biteur. Nous osons espĂ©rer que le lĂ©gislateur OHADA prendra en compte cette prĂ©occupation lors de la rĂ©vision de lâActe Uniforme Ă venir.
d)-Le dépÎt des dires et observations
Le saisi qui a pris connaissance de la teneur du cahier des charges doit faire valoir ses prĂ©tentions au moyen des Ă©critures intitulĂ©es « dires et observations ». Lâarticle 270 AUVE lui impartit un dĂ©lai assez bref, jusquâau cinquiĂšme jour prĂ©cĂ©dent lâaudience Ă©ventuelle pour dĂ©poser ses dires. Le saisi ne doit pas attendre la tenue de lâaudience Ă©ventuelle afin de dĂ©poser ses dires et observations. Ceux-ci doivent ĂȘtre dĂ©posĂ©s impĂ©rativement au greffe juste aprĂšs avoir pris connaissance de la teneur du cahier des charges. Il sâagit dâune date butoir Ă laquelle il ne peut ĂȘtre dĂ©rogĂ©. En cas dâinobservation, la dĂ©chĂ©ance sera encourue.
B – De lâaudience Ă©ventuelle Ă lâadjudication de lâimmeuble
Avant de poursuivre la vente par lâadjudication de lâimmeuble, le tribunal doit, sâil ya lieu, trancher les contestations soulevĂ©es lors dâune audience dite Ă©ventuelle.
1)- La tenue de lâaudience Ă©ventuelle
DâemblĂ©e, il faut indiquer que la tenue de lâaudience Ă©ventuelle nâest pas une obligation pour le tribunal mais une Ă©ventualitĂ©, elle ne se tient « quâĂ©ventuellement » lorsque que les dires et observations ont Ă©tĂ© dĂ©posĂ©s. En application de lâarticle 268 de lâAUVE, la tenue de cette audience doit ĂȘtre fixĂ©e quarante cinq (45) jours au plus tĂŽt aprĂšs le dĂ©pĂŽt du cahier des charges et quatre vingt dix (90) jours au plus tard aprĂšs le dĂ©pĂŽt. Cette date est fixĂ©e dans la sommation de prendre communication du cahier de charges dans les conditions prĂ©vues Ă lâarticle 270 de lâActe Uniforme. Quoiquâil en soit, la tenue de lâaudience Ă©ventuelle est fonction de lâabsence ou du dĂ©pĂŽt des dires et observations.
a) En lâabsence des dires et observations
A dĂ©faut des dires et observations, la tenue de lâaudience Ă©ventuelle est non avenue. Il sera procĂ©dĂ© Ă lâaccomplissement des formalitĂ©s de publicitĂ© en vue de la vente de lâimmeuble, le tribunal prendra acte de lâabsence des dires et observations pour renvoyer lâaffaire Ă lâaudience dâadjudication dont il fixera la date, lorsque la premiĂšre date nâa pu ĂȘtre tenue. NĂ©anmoins, mĂȘme en lâabsence des dires, cette audience peut ĂȘtre tenue en application des dispositions de lâarticle 275 AUVE. Il en est ainsi lorsque le tribunal exerce dâoffice son contrĂŽle sur le cahier des charges afin de sâassurer que celui-ci est conforme aux prescriptions lĂ©gales. A cet effet, Ă lâaudience Ă©ventuelle, il peut modifier le montant de la mise Ă prix si celle-ci nâa pas Ă©tĂ© fixĂ©e conformĂ©ment aux dispositions de lâarticle 267-10 tout comme il peut ordonner la distraction de certains biens saisis toutes les fois que leur valeur globale apparait disproportionnĂ©e par rapport au montant des crĂ©ances Ă rĂ©cupĂ©rer.
b) En présence des dires et observations
Lorsque les dires et observations sont dĂ©posĂ©s, lâaudience Ă©ventuelle doit ĂȘtre tenue afin quâil soit statuĂ© sur leurs mĂ©rites. En vertu de lâarticle 272 de lâActe Uniforme, ces dires et observations doivent ĂȘtre jugĂ©s aprĂšs Ă©change de conclusions motivĂ©es des parties, qui doit ĂȘtre effectuĂ© dans le respect du principe du contradictoire. Cela revient Ă dire que le tribunal ne peut statuer sur ces dires quâĂ lâissue dâun dĂ©bat contradictoire.
Parmi les points qui font habituellement lâobjet des contestations figure la mise Ă prix. Il faut rappeler que le poursuivant peut ĂȘtre dĂ©clarĂ© adjudicataire de lâimmeuble en lâabsence dâadjudicataire (Art.283 al.5). Câest la raison pour laquelle le poursuivant est tentĂ© de minorer la valeur vĂ©nale de lâimmeuble en fixant une mise Ă prix en deçà de la valeur rĂ©elle du bien Ă©tant entendu quâil se retrouve paradoxalement dans une situation oĂč lâacquĂ©reur fixe le prix de vente !
Les dires et observations sont le procĂ©dĂ© idoine pour contester la mise Ă prix ainsi fixĂ©, pour en modifier le quantum en proposant une nouvelle mise en adĂ©quation avec la valeur vĂ©nale de lâimmeuble et les conditions du marchĂ©. Cependant le saisi qui espĂšre obtenir le versement du solde aprĂšs avoir dĂ©sintĂ©ressĂ© ses crĂ©anciers est tout aussi tentĂ© de surestimer la valeur de son bien en fixant une mise Ă prix sans rapport avec la valeur vĂ©nale de lâimmeuble. Au regard de ces intĂ©rĂȘts antagonistes, lâarticle 272 suscitĂ© apporte une solution adĂ©quate en disposant que « lorsque le montant de la mise Ă prix est contestĂ©, il appartient Ă celui qui formule cette contestation de rapporter la preuve du bien fondĂ© de celle-ci. Il peut demander au prĂ©sident de la juridiction compĂ©tente la dĂ©signation dâun expert Ă ses frais avancĂ©s ». La dĂ©signation dâun expert chargĂ© dâĂ©valuer, en toute objectivitĂ©, la valeur vĂ©nale de lâimmeuble permet de concilier les intĂ©rĂȘts divergents des deux parties. Encore faut-il que le dĂ©biteur contestataire puisse avancer les frais de lâexpertise, ce qui nâest pas Ă©vident. La saisie immobiliĂšre Ă©tant lâultime mesure dâexĂ©cution Ă laquelle le crĂ©ancier a recours , le dĂ©biteur saisi se trouvant souvent dans un Ă©tat dâimpĂ©cuniositĂ© assez prononcĂ©.
b-1) La date de lâaudience
Lâaudience doit ĂȘtre tenue Ă la date fixĂ©e dans la sommation. Cette audience ne peut avoir lieu moins de trente (30) jours aprĂšs la derniĂšre sommation . Ce qui revient Ă dire quâentre la date de la derniĂšre sommation et celle de la tenue de lâaudience Ă©ventuelle, il doit sâĂ©couler au minimum trente (30) jours, la jurisprudence rappelle que cette date ne peut ĂȘtre fixĂ©e avant lâĂ©puisement de ce dĂ©lai .
Une fois fixĂ©e, la date de lâaudience Ă©ventuelle ne doit pas faire lâobjet de report. Ce principe consacrĂ© Ă lâarticle 273 de lâAUVE doit ĂȘtre observĂ© par les tribunaux qui ne devraient y dĂ©roger que dans le respect des conditions prĂ©vues par le mĂȘme article aux termes duquel « Une remise de lâaudience Ă©ventuelle ne peut avoir lieu que pour des causes graves et dĂ»ment justifiĂ©es, ou bien lorsque la juridiction compĂ©tente exerce dâoffice son contrĂŽle sur le cahier des charges ainsi quâil est dit Ă lâarticle 275 ci-aprĂšs ». Selon lâarticle 275 « La juridiction compĂ©tente peut, dâoffice, Ă lâaudience Ă©ventuelle, et si nĂ©cessaire, aprĂšs consultation par Ă©crit dâun expert, recueillie sans dĂ©lai :
1) ordonner la distraction de certains biens saisis toutes les fois que leur valeur globale apparaßt disproportionnée par rapport au montant des créances à récupérer ;
2) modifier le montant de la mise Ă prix si celle-ci nâa pas Ă©tĂ© fixĂ©e conformĂ©ment aux dispositions de lâarticle 267-10 ci-dessus.
Dans ce cas, la juridiction compĂ©tente informe les parties de son intention de modifier le cahier des charges et les invite Ă prĂ©senter leurs observations dans un dĂ©lai maximum de cinq (05) jours ; elle leur indique, si besoin est, les jour et heure de lâaudience si lâaffaire nâa pu ĂȘtre jugĂ©e Ă la date initialement prĂ©vue ».
Hormis ces hypothĂšses de dĂ©rogations lĂ©gales, la doctrine et la jurisprudence sâaccordent pour dire que lâaudience Ă©ventuelle ne peut faire lâobjet dâun report, certains auteurs Ă©voquant mĂȘme le principe de « lâimmutabilitĂ© de la date de lâaudience Ă©ventuelle ». Ainsi pour casser une dĂ©cision ayant accordĂ© un report de lâaudience Ă©ventuelle, la Cour de Cassation a jugĂ© « quâil nâest au pouvoir ni des parties ni du tribunal de modifier la date de lâaudience Ă©ventuelle fixĂ©e dans la sommation ».
En dĂ©pit de cette exigence de cĂ©lĂ©ritĂ©, dictĂ©e par le souci de vaincre le dilatoire dans les procĂ©dures de saisie immobiliĂšre , force est de constater quâen pratique, le principe de « lâimmutabilitĂ© de la date de lâaudience Ă©ventuelle » a Ă©tĂ© Ă©levĂ© au rang dâexception et lâexception de report Ă©rigĂ©e en principe de sorte que la tenue de lâaudience Ă©ventuelle Ă la date fixĂ©e dans la sommation est devenue exceptionnelle.
Parmi les causes qui contribuent au report de lâaudience Ă©ventuelle, on peut citer lâobligation faite Ă la juridiction des respecter le principe du contradictoire. Lâavocat du saisi ne produisant ses dires que sĂ©ance tenante Ă lâaudience, le poursuivant va devoir solliciter un renvoi que le tribunal ne peut que lui concĂ©der. Advenue la prochaine audience, le poursuivant qui reçoit communication des Ă©critures du saisi va solliciter Ă son tour, un renvoi pour y rĂ©pondre, puis sâinstaure le jeu des renvois pouvant durer plusieurs mois. Ainsi « chaque juridiction sâaccommode dâentorses au principe, soit en renvoyant purement et simplement lâaudience, soit en mettant en continuation, lorsquâun incident est soulevĂ© ».
Le dĂ©biteur qui veut faire Ă©chec Ă lâexpropriation forcĂ©e de son immeuble ou Ă tout le moins, Ă faire perdurer la procĂ©dure, saisira cette opportunitĂ© pour multiplier les manĆuvres dilatoires et Dieu seul sait, jusquâoĂč peut aller lâimagination fertile dâun avocat qui entend mettre son talon au service du dilatoire : il peut solliciter le rabattement du dĂ©libĂ©rĂ© pour la production dâune piĂšce, semble t-il, essentielle, inciter Ă la constitution dâun confrĂšre pendant que lâaffaire est remise en dĂ©libĂ©rĂ©, lequel confrĂšre va, pour sa part, solliciter le rabattement pour produire ses Ă©critures etc. Des raisons indĂ©pendantes Ă la volontĂ© des parties peuvent Ă©galement contribuer au report de la date dâaudience. Ce peut ĂȘtre le cas des perturbations constatĂ©es Ă lâoccasion des vacances judiciaires, ou dâune grĂšve des avocats ou encore celle des greffiers.
Dans lâaffaire ayant donnĂ© lieu au jugement du 05 octobre 2012 rendu par le Tribunal de Grande Instance de Brazzaville, alors que la tenue de lâaudience Ă©ventuelle Ă©tait fixĂ©e Ă la date du 30 mars 2012, celle-ci nâa eu lieu que le 05 octobre 2012, soit six mois plus tard. Dans une autre affaire vidĂ©e le mĂȘme jour par ce tribunal, la tenue de lâaudience Ă©ventuelle Ă©tait fixĂ©e initialement le 30 mars 2012.
Cette pratique dĂ©plorable contribue Ă faire perdurer la procĂ©dure. Elle est tout autant contraire aux objectifs de lâOHADA tels dĂ©finis par le prĂ©ambule du traitĂ© de Port-Louis de 1993 modifiĂ© Ă QuĂ©bec le 17 octobre 2008 dans la mesure oĂč elle risque de dissuader les banques Ă soutenir le dĂ©veloppement des entreprises, dâoĂč lâimpĂ©rieuse nĂ©cessitĂ© pour le lĂ©gislateur OHADA dâencadrer cette pratique en limitant, par exemple, le nombre de renvois.
b- 2) La transcription du jugement sur le cahier des charges
Aux termes les dispositions de lâarticle 274 de lâAUVE, « La dĂ©cision judiciaire rendue Ă lâoccasion de lâaudience Ă©ventuelle est transcrite sur le cahier des charges par le greffier ; elle est levĂ©e et signifiĂ©e Ă la demande de la partie la plus diligente ». La transcription de ce jugement sur le cahier des charges permet de fixer les parties sur les conditions dĂ©finitives de vente de lâimmeuble. Il faut rappeler quâune partie a pu Ă©lever des contestations lesquelles ont Ă©tĂ© tranchĂ©es Ă lâaudience Ă©ventuelle. Ce faisant, le tribunal a dĂ» trancher la contestation en apportant une rĂ©ponse qui a pu bouleverser lâĂ©conomie des clauses contenues dans le cahier des charges. Il en est ainsi lorsque le tribunal a fait droit Ă un dire tendant Ă la modification de la mise Ă prix fixĂ©e par le poursuivant. De ce fait, relativement Ă ce chef de demande, ce jugement devient partie intĂ©grante du cahier des charges, qui sâimpose aussi bien au poursuivant, au crĂ©ancier inscrit quâau saisi. Pourtant, force est de constater que cette formalitĂ© nâest jamais accomplie par le greffe, lequel se limite Ă matĂ©rialiser la dĂ©cision rendue sans la transcrire sur le cahier des charges. Le PrĂ©sident du tribunal peut utilement instruire le greffe Ă propos. Le lĂ©gislateur OHADA nâa pas prescrit de dĂ©lai pour lâaccomplissement de cette transcription. Il convient dâindiquer que cette formalitĂ© doit ĂȘtre accomplie sans dĂ©lai, aprĂšs la signature de la minute.
En outre, ce jugement doit ĂȘtre levĂ©e et signifiĂ©e Ă la demande de la partie la plus diligente. Cette formalitĂ© qui a lâavantage de porter la dĂ©cision Ă la partie qui aurait abandonnĂ©e la procĂ©dure doit ĂȘtre accomplie faute de quoi la suite de la procĂ©dure sera invalidĂ©e. Il a Ă©tĂ© dĂ©cidĂ© que, lorsque le jugement rendu Ă lâaudience Ă©ventuelle nâa pas Ă©tĂ© signifiĂ© au dĂ©biteur, lâadjudication intervenue doit ĂȘtre annulĂ©e .
b-3)- La publicité en vue de la vente
Les formalitĂ©s de publicitĂ© doivent ĂȘtre accomplies trente (30) jours au plus tĂŽt et quinze (15) jours au plus tard avant lâadjudication. Il sâagit « dâun dĂ©lai Ă rebours » qui se calcule en remontant le temps en partant de la date de lâadjudication pour dĂ©terminer le point de dĂ©part. Ainsi pour une audience dâadjudication fixĂ©e au 31 mars, la publicitĂ© doit ĂȘtre accomplie au plus tĂŽt le 1er mars et au plus tard le 16 mars. Ce dĂ©lai est largement tributaire de la tenue ou non de lâaudience Ă©ventuelle. Si lâaudience Ă©ventuelle a Ă©tĂ© reportĂ©e, la publicitĂ© sera accomplie en tenant compte de la nouvelle date dâadjudication fixĂ©e par le tribunal.
La publicitĂ© sâeffectue par lâavocat poursuivant, lequel doit publier, sous sa signature, un extrait du cahier des charges, par insertion dans un journal dâannonces lĂ©gales et par apposition de placards Ă la porte du domicile du saisi, du tribunal devant lequel aura lieu lâadjudication ou du notaire convenu ainsi que dans les lieux officiels dâaffichage de la commune de la situation des biens .
En vertu de lâarticle 277 AUVE, Lâextrait contient Ă peine de nullitĂ© :
1) les noms, prénoms, professions, domiciles ou demeures des parties et de leurs avocats ;
2) la dĂ©signation des immeubles saisis telle quâelle est insĂ©rĂ©e dans le cahier des charges ;
3) la mise Ă prix ;
4) lâindication des jour, lieu et heure de lâadjudication, de la juridiction compĂ©tente ou du notaire convenu devant qui elle se fera.
Lâaccomplissement de cette formalitĂ© ne va pas sans difficultĂ©, certains auteurs font remarquer que le saisi a la fĂącheuse habitude dâarracher systĂ©matiquement les placards apposĂ©s Ă la porte de son domicile. Cela ne devrait aucunement inciter le poursuivant Ă se soustraire Ă lâaccomplissement de cette formalitĂ© substantielle. Il pourra simplement solliciter le ministĂšre dâun huissier de justice qui dressera procĂšs verbal de toutes ces diligences.
Pour justifier lâaccomplissement de la publicitĂ©, lâarticle 278 indique que le poursuivant doit produire un exemplaire du journal, signĂ© de lâimprimeur, et de lâaffichage par un procĂšs-verbal de lâhuissier ou de lâagent dâexĂ©cution, rĂ©digĂ© sur un exemplaire du placard.
En outre, eu Ă©gard Ă la nature du bien, lâarticle 279 de lâActe Uniforme donne la possibilitĂ© au PrĂ©sident du tribunal de restreindre ou dâaccroĂźtre la publicitĂ© lĂ©gale par dĂ©cision non susceptible de recours, rendue sur requĂȘte,
2)-Lâadjudication de lâimmeuble
La vente est poursuivie devant la juridiction ayant plĂ©nitude de juridiction dans le ressort oĂč se trouve lâimmeuble. Dans lâorganisation judiciaire du Congo (Congo-Brazzaville) ou du Niger, la juridiction ayant plĂ©nitude de juridiction est le Tribunal de Grande Instance. Sâagissant de la CĂŽte dâIvoire, du BĂ©nin ou du Gabon, le tribunal compĂ©tent dont il sâagit est le Tribunal de PremiĂšre Instance (TPI).
La vente forcĂ©e des immeubles dĂ©pendant dâune mĂȘme exploitation et situĂ©s dans le ressort de plusieurs juridictions se poursuit devant lâune quelconque de celles-ci (Art.247 AUVE). Il faut prĂ©ciser que la vente peut Ă©galement ĂȘtre poursuivie en lâĂ©tude du notaire convenu entre les parties. NĂ©anmoins, mĂȘme lorsque les parties ont convenu de poursuivre la vente devant notaire, en cas de contestations, câest le Tribunal de Grande Instance qui devra trancher. Une difficultĂ© peut cependant surgir lorsque le saisi conteste le notaire choisi par le poursuivant. En rĂ©alitĂ©, quoique lâarticle 288 AUVE emploi lâexpression du « notaire convenu », en pratique le notaire est souvent choisi par le poursuivant sans lâavis du saisi . LâActe Uniforme nâa pas directement abordĂ© la question, mais cette prĂ©occupation trouve sa rĂ©ponse dans les dispositions de lâarticle 298 de lâAUVE. Etant entendu quâil sâagit dâune contestation formulĂ©e postĂ©rieurement Ă la signification du commandement, le contestataire doit saisir le tribunal, lequel devra dĂ©cider du lieu de lâadjudication. Aussi a t-il Ă©tĂ© jugĂ© que le tribunal dispose dâun pouvoir souverain pour dĂ©cider si la vente se fera Ă la barre ou devant notaire.
LâActe Uniforme nâa pas rĂ©glementĂ© lâadjudication poursuivie devant notaire pour des raisons Ă©videntes, il a cependant rĂšglementĂ© le dĂ©roulement de celle se dĂ©vant le tribunal.
a) Le dĂ©roulement de lâaudience dâadjudication
Lâaudience dâadjudication obĂ©it Ă un rituel assez particulier. A lâouverture de lâaudience, il est procĂ©dĂ© Ă la vente sur la rĂ©quisition, mĂȘme verbale, de lâavocat du poursuivant ou de tout crĂ©ancier inscrit . Celui-ci indique publiquement le montant des frais de poursuite prĂ©alablement taxĂ©s par le prĂ©sident du tribunal . Cette rĂ©quisition, souvent verbale, donne lâoccasion Ă lâavocat poursuivant de rappeler, sommairement, les faits de la cause, les diligences accomplies avant de requĂ©rir la vente de lâimmeuble. Rappelons que la loi fait obligation Ă lâavocat du poursuivant ou Ă celui du crĂ©ancier inscrit de requĂ©rir la vente afin que le prĂ©sident puisse annoncer lâouverture des enchĂšres. A ce sujet, le Professeur Anne LEBORGNE estime que « câest lĂ encore une particularitĂ© de la procĂ©dure de saisie immobiliĂšre : la vente, audiencĂ©e, nâest pas ordonnĂ©e dâoffice par le tribunal » il faut donc quâelle soit requise.
Avant lâouverture des enchĂšres, il est prĂ©parĂ© trois bougies de maniĂšre que chacune dâelles ait une durĂ©e dâenviron une minute. AussitĂŽt les enchĂšres ouvertes et faisant droit Ă la rĂ©quisition de lâavocat poursuivant, le prĂ©sident annonce lâouverture des enchĂšres ; Il est allumĂ© une bougie et le montant de la mise Ă prix est annoncĂ©. Les enchĂšres sont portĂ©es par ministĂšre dâavocat ou par les enchĂ©risseurs eux-mĂȘmes conformĂ©ment aux dispositions de lâarticle 282 AUVE.
Selon lâarticle 283, si pendant la durĂ©e dâune bougie, il survient une enchĂšre, celle-ci ne devient dĂ©finitive et nâentraĂźne lâadjudication que sâil nâen survient pas une nouvelle avant lâextinction de deux bougies. LâenchĂ©risseur cesse dâĂȘtre obligĂ© si son enchĂšre est couverte par une autre, alors mĂȘme que lâenchĂšre nouvelle serait dĂ©clarĂ©e nulle. Sâil ne survient pas dâenchĂšre aprĂšs que lâon ait allumĂ© successivement trois bougies, le poursuivant est dĂ©clarĂ© adjudicataire pour la mise Ă prix Ă moins quâil ne demande la remise de lâadjudication Ă une autre audience sur une nouvelle mise Ă prix conforme aux dispositions de lâarticle 267-10 ci-dessus. La remise de lâadjudication est de droit ; les formalitĂ©s de publicitĂ© doivent ĂȘtre rĂ©itĂ©rĂ©es.
En cas de remise, si aucune enchĂšre nâest portĂ©e lors de la nouvelle adjudication le poursuivant est dĂ©clarĂ© adjudicataire pour la premiĂšre mise Ă prix. Cette disposition appelle quelques prĂ©cisions : rappelons que lors de lâaudience Ă©ventuelle, le tribunal a pu rĂ©Ă©valuer la mise Ă prix de lâimmeuble suite Ă un dire formulĂ© par le saisi dans ce sens. Dans ce cas, la vente est poursuivie non pas sur la mise Ă prix fixĂ©e par le poursuivant mais sur celle fixĂ©e Ă lâaudience Ă©ventuelle. En application de lâarticle 283, le poursuivant devra ĂȘtre dĂ©clarĂ© adjudicataire sur cette mise Ă prix quâil peut estimer exagĂ©rĂ©e Ă raison ou par pure mauvaise foi. Ne pouvant se porter adjudicataire pour une mise Ă prix quâil nâa pas approuvĂ©, il est en droit de solliciter une remise de la vente. AprĂšs quoi le poursuivant doit rĂ©itĂ©rer les formalitĂ©s de publicitĂ©. Advenue cette audience, sâil nây a pas dâenchĂ©risseurs, le poursuivant sera dĂ©clarĂ© adjudicataire, mais pour la premiĂšre mise Ă prix, câest â Ă dire celle par lui initialement fixĂ©e. Evidemment, prise au pied de la lettre, cette disposition peut donner lieu Ă beaucoup dâabus de la part du poursuivant. DâoĂč la nĂ©cessitĂ© pour le saisi de veiller Ă la mise en Ćuvre des formalitĂ©s de publicitĂ©s afin dâintĂ©resser un nombre considĂ©rable dâadjudicataires potentiels.
LâenchĂ©risseur nâest pas tenu dâĂȘtre prĂ©sent Ă la vente. Il peut se faire reprĂ©senter par son avocat ou par un mandataire. Contrairement, au Conseil National des Barreaux(CNB) de France dont le rĂšglement intĂ©rieur national fait interdiction Ă un avocat de porter plusieurs enchĂšres pour plusieurs clients , lâarticle 282 AUVE autorise un avocat de reprĂ©senter plusieurs enchĂ©risseurs lorsque ceux-ci dĂ©sirent se porter Co-adjudicataires. Il sâinfĂšre que lorsque lesdits enchĂ©risseurs entendent se porter adjudicataires, chacun en toute propriĂ©tĂ©, ils ne peuvent ĂȘtre reprĂ©sentĂ©s par le mĂȘme avocat.
Lâarticle 281 de lâActe Uniforme autorise la remise de lâadjudication pour causes graves et lĂ©gitimes par dĂ©cision judiciaire motivĂ©e rendue sur requĂȘte dĂ©posĂ©e cinq (05) jours au moins avant le jour fixĂ© pour la vente. En cas de remise, la dĂ©cision judiciaire fixe, de nouveau, le jour de lâadjudication qui ne peut ĂȘtre Ă©loignĂ© de plus de soixante (60) jours. Le crĂ©ancier poursuivant doit procĂ©der Ă une nouvelle publicitĂ©.
b) Les formalitĂ©s postĂ©rieures Ă lâadjudication
Si lâadjudication peut ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme la fin de la procĂ©dure judiciaire lorsque lâexpropriation sâest dĂ©roulĂ©e sans incident, elle constitue le point de dĂ©part pour lâaccomplissement de certaines formalitĂ©s consĂ©cutives Ă celle-ci.
1)-La dĂ©claration dâadjudicataire
Lâarticle 286 alinĂ©as 1 de lâAUVE impose Ă lâavocat, dernier enchĂ©risseur de dĂ©clarer lâadjudicataire et de fournir son acceptation ou de reprĂ©senter son pouvoir, lequel demeure annexĂ© Ă la minute de la dĂ©claration judiciaire ou notariĂ©e, sinon il est rĂ©putĂ© adjudicataire en son nom. Il est tenu de faire cette dĂ©claration dans les trois (03) jours de lâadjudication. La briĂšvetĂ© de ce dĂ©lai sâinscrit dans le souci de rĂ©vĂ©ler lâidentitĂ© de lâadjudicataire aux crĂ©anciers, lesquels peuvent soulever des contestations au cas oĂč le preneur Ă©tait interdit de se porter adjudicataire en vertu de lâarticle 284. Lâavocat qui ne reprĂ©sente que son client pendant lâaudience, les parties ignorent pour qui lâavocat sâest portĂ© acquĂ©reur.
2)-La déclaration de commande
Lâobligation faite Ă lâavocat de rĂ©vĂ©ler lâidentitĂ© de lâadjudicataire sâimpose Ă©galement Ă lâadjudicataire qui sâest portĂ© acquĂ©reur pour un tiers, de faire connaĂźtre, par une dĂ©claration dite « de commande » que ce nâest pas pour son compte quâil sâest rendu acquĂ©reur, mais pour une autre personne dont il rĂ©vĂšle alors le nom. Cette dĂ©claration doit ĂȘtre faite dans les vingt quatre heures, (Art.286 al.2). Ce dĂ©lai (24 heures) est assez bref en comparaison Ă celui imparti Ă lâavocat dernier enchĂ©risseur (72 heures).
3)- la transcription de lâacte dâadjudication sur le cahier des charges
En application des dispositions de lâarticle 290, aprĂšs la vente, la dĂ©cision judiciaire ou le procĂšs verbal dâadjudication du notaire doit ĂȘtre portĂ© en minute Ă la suite du cahier des charges. Une expĂ©dition en est dĂ©livrĂ©e, selon le cas, par le greffier ou le notaire, Ă lâadjudicataire aprĂšs paiement des frais de poursuite et du prix dâadjudication et aprĂšs lâaccomplissement des conditions du cahier des charges qui doivent ĂȘtre exĂ©cutĂ©es dans les vingt (20) jours de lâadjudication. Toutefois, si lâadjudicataire est seul crĂ©ancier inscrit ou privilĂ©giĂ© du saisi, il nâest tenu de payer, outre les frais, que le montant du prix dâadjudication excĂ©dant sa crĂ©ance. La quittance et les piĂšces justificatives sont annexĂ©es Ă la minute de la dĂ©cision judiciaire ou du procĂšs-verbal dâadjudication Ă©tabli par le notaire et reproduites Ă la suite de lâexpĂ©dition. Lâadjudicataire qui nâapporte pas ces justifications dans les vingt (20) jours de lâadjudication peut ĂȘtre poursuivi par la voie de la folle enchĂšre sans prĂ©judice des autres voies de droit.
Si lâadjudication comprend plusieurs lots, expĂ©dition de la dĂ©cision judiciaire ou du procĂšs-verbal dâadjudication Ă©tabli par le notaire en la forme exĂ©cutoire est dĂ©livrĂ©e Ă chacun des adjudicataires
4)- La publication de lâacte dâadjudication
Selon les dispositions de lâarticle 294 de lâAUVE, lorsque lâadjudication est devenue dĂ©finitive, une expĂ©dition de la dĂ©cision judiciaire ou du procĂšs-verbal dâadjudication Ă©tabli par le notaire est dĂ©posĂ©e Ă la conservation fonciĂšre aux fins dâinscription. Le conservateur procĂšde Ă la mention de cette publication en marge de la copie du commandement publiĂ©.
Sâagissant de la saisie rĂ©alisĂ©e sur les impenses, lâarticle 295 dispose que lorsque la saisie immobiliĂšre porte sur des impenses rĂ©alisĂ©es par le dĂ©biteur sur un terrain dont il nâest pas propriĂ©taire mais qui lui a Ă©tĂ© affectĂ© par une dĂ©cision dâune autoritĂ© administrative et que lâadjudication est devenue dĂ©finitive, une expĂ©dition de la dĂ©cision judiciaire ou du procĂšs-verbal notariĂ© dâadjudication est dĂ©posĂ©e auprĂšs de cette autoritĂ© administrative aux fins de mention en marge de la dĂ©cision dâaffectation.
La publication de lâacte dâadjudicataire doit ĂȘtre effectuĂ©e dans un dĂ©lai de deux mois sous peine de revente sur folle enchĂšre conformĂ©ment Ă lâarticle 294 de lâAUVE. Lâon peut remarquer que lâarticle 295 nâimpartit aucun dĂ©lai sâagissant de la saisie rĂ©alisĂ©e sur les impenses. Dans le silence de la loi, le dĂ©lai prescrit Ă lâarticle 294 peut valablement ĂȘtre appliquĂ© Ă la publication du jugement consĂ©cutif Ă une vente des impenses.
5)-La purge des garanties et radiation des inscriptions
La purge des garanties et la radiation des inscriptions sont la consĂ©quence logique de lâadjudication. En effet, aprĂšs avoir procĂ©dĂ© Ă la mention de la publication de lâacte dâadjudication en marge de la copie du commandement publiĂ©, le conservateur procĂšde Ă©galement Ă la radiation de tous les privilĂšges et hypothĂšques inscrits qui se trouvent purgĂ©s par la vente, mĂȘme de ceux inscrits postĂ©rieurement Ă la dĂ©livrance des Ă©tats dâinscription. Les crĂ©anciers nâont, alors, plus dâactions que sur le prix (art.294 alinĂ©a 3). De mĂȘme, sâagissant des impenses visĂ©es Ă lâarticle 295 alinĂ©a 1, lâautoritĂ© administrative procĂšde Ă la radiation de toutes les mentions opĂ©rĂ©es en marge de la dĂ©cision dâaffectation initiale et transfĂšre lâaffectation au profit de lâadjudicataire. Les crĂ©anciers nâont plus dâactions que sur le prix.
Toutefois, il est permis de relativiser la portĂ©e de ces dispositions Ă©tant entendu que selon les dispositions de lâarticle 296, « Lâadjudication, mĂȘme publiĂ©e au bureau de la conservation fonciĂšre, ne transmet Ă lâadjudicataire dâautres droits rĂ©els que ceux appartenant au saisi », de sorte que la purge des garanties ne se produit pour autant que le saisi ait Ă©tĂ© le vĂ©ritable propriĂ©taire, les garanties constituĂ©es par le vĂ©ritable propriĂ©taire subsisteront .
Le tiers propriĂ©taire qui nâaurait pas eu connaissance de la procĂ©dure de saisie pour formuler une demande en distraction dans les dĂ©lais peut valablement initier une action en revendication contre lâadjudicataire sans que ne lui soit opposĂ© la dĂ©chĂ©ance de son action sur le fondement de lâarticle 299 alinĂ©a 2 de lâAUVE. Dans lâaffaire opposant la SociĂ©tĂ© TAMOIL BURKINA S.A c/ SAWADOGO Pelga dit BOUKARY devant la Cour dâAppel de OUAGADOUGOU (arrĂȘt N°20 du 18 fĂ©vrier 2005), le sieur BOUKARY ignorant lâexistence dâune procĂ©dure dâexpropriation entreprise sur son immeuble adjugĂ© par la SociĂ©tĂ© TAMOIL BURKINA au dĂ©triment de la sociĂ©tĂ© TANGUI, BOUKARY a obtenu lâexpulsion de lâadjudicataire. Sur pourvoi formulĂ© par la SociĂ©tĂ© TAMOIL, la CCJA a jugĂ© « quâil est de rĂšgle que dans la procĂ©dure de saisie immobiliĂšre entre les parties, le transfert de propriĂ©tĂ© se rĂ©alise dĂšs le prononcĂ© du jugement dâadjudication, que toutefois, lâadjudication ne transmettant Ă lâadjudicataire dâautres droits de propriĂ©tĂ© que ceux appartenant au saisi, si celui-ci nâĂ©tait pas le vĂ©ritable propriĂ©taire de lâimmeuble adjugĂ©, ce dernier pourrait lĂ©gitimement exercer contre lâadjudicataire une action en revendication, dĂšs lors que le revendiquant se fonde sur un droit rĂ©el incontestable qui, en raison de son caractĂšre absolu, emporte droit de suite et droit de prĂ©fĂ©rence ».
En droit positif congolais, la mise en Ćuvre dâune action en revendication postĂ©rieurement Ă lâadjudication nâaugure pas des perspectives reluisantes pour le revendiquant eu Ă©gard aux dispositions de la loi N° 17/2000 du 30 dĂ©cembre 2000 prĂ©citĂ©e. En effet, en toute hypothĂšse, avant lâadjudication, lâimmeuble Ă exproprier est immatriculĂ© au nom du dĂ©biteur saisi, or, dit lâarticle 12 de cette loi, « lâimmatriculation annule tous titres et purge tous droits antĂ©rieurs (des potentiels revendiquants) dĂšs lors que ceux âci ne sont pas mentionnĂ©s dans le registre de la propriĂ©tĂ© fonciĂšre ».
Dans une affaire soumise au Tribunal de Grande Instance de Brazzaville, le sieur MOMPELET crĂ©ancier poursuivant avait requis lâimmatriculation de lâimmeuble de son dĂ©biteur le sieur NGAIBILI, avant de dĂ©clencher une procĂ©dure de saisie immobiliĂšre. ParallĂšlement, son dĂ©biteur, le sieur NGAIBILI qui Ă©tait Ă©galement dĂ©biteur de Sieur ITOUA va cĂ©der sa propriĂ©tĂ© Ă ce dernier Ă la suite dâune transaction et Ă lâinsu du sieur MOMPELET. Alors que le sieur ITOUA se disant propriĂ©taire avait rĂ©alisĂ© dâimportants travaux de rĂ©fection, il sera surpris de constater que son ex- dĂ©biteur, Ă©tait Ă©galement dĂ©biteur dâun autre crĂ©ancier, lequel venait dâinitier une procĂ©dure de saisie immobiliĂšre sur la propriĂ©tĂ© en cause, sieur ITOUA va solliciter la distraction dudit bien en articulant que lâimmeuble dont sâagit Ă©tait devenu sa propriĂ©tĂ©. Pour rejeter cette demande, le tribunal a dĂ©cidĂ© que lâaction en distraction, doit, pour aboutir, Ă©tablir de maniĂšre incontestable le droit de propriĂ©tĂ© du tiers revendiquant sur lâimmeuble en cause, quâen application de lâarticle 12 (loi N° 17/2000 du 30 dĂ©cembre 2000 suscitĂ©) lâimmatriculation de la parcelle objet des poursuites au nom du sieur NGAIBILI, dĂ©biteur saisi, a purgĂ© tous les droits antĂ©rieurs dont pouvaient se prĂ©valoir le sieur ITOUA, tiers revendiquant, sur la propriĂ©tĂ© disputĂ©e .
3)-LâĂ©ventualitĂ© dâune surenchĂšre
La saisie immobiliĂšre peut faire lâobjet dâune surenchĂšre. Celle-ci sâentend dâun acte par lequel lâadjudication est remise en cause, entraĂźnant par la mĂȘme occasion une nouvelle mise aux enchĂšres . La surenchĂšre est faite au greffe du tribunal qui a ordonnĂ© la vente ou devant le notaire convenu, par le surenchĂ©risseur lui-mĂȘme ou par ministĂšre dâavocat, qui se constitue pour le surenchĂ©risseur. Elle est mentionnĂ©e, sans dĂ©lai, au cahier des charges. La surenchĂšre est soumise aux conditions, tenant Ă la fois, Ă la personne du surenchĂ©risseur et au dĂ©lai.
a) Les conditions tenant au surenchérisseur
Lâarticle 287 donne la possibilitĂ© Ă toute personne de faire une surenchĂšre pourvu quâelle soit du dixiĂšme au moins du prix principal de la vente. Cette disposition, doit ĂȘtre mise en relief avec lâarticle 284 de lâAUVE qui pose des restrictions Ă la libertĂ© des enchĂšres et Ă©carte de celles-ci certaines personnes en raison soit de leurs fonctions, de leur implication dans la procĂ©dure ou de leur rĂ©putation. Ainsi les avocats qui sont interdits dâenchĂ©rir pour les membres du tribunal devant lequel lâadjudication a eu lieu ou de lâoffice notarial devant lequel se poursuit la vente, pour le saisi ni pour les personnes notoirement insolvables, ne peuvent davantage surenchĂ©rir pour les mĂȘmes personnes. Lâavocat poursuivant qui ne peut se rendre personnellement adjudicataire ne peut se porter surenchĂ©risseur Ă peine de nullitĂ© de la surenchĂšre et de dommages-intĂ©rĂȘts envers toutes les parties. Mais cette restriction ne concerne nullement le crĂ©ancier poursuivant qui entend faire une surenchĂšre. Câest du moins ce que prĂ©cise la CCJA lorsquâelle a dĂ©cidĂ© que « la facultĂ© de surenchĂ©rir au moins au dixiĂšme du prix initial (âŠ) nâinterdit pas au crĂ©ancier poursuivant de faire une surenchĂšre au cours dâune procĂ©dure de vente forcĂ©e dâun immeuble ».
b)- Le délai pour surenchérir
Selon lâarticle 287 de lâAUVE, dans les dix (10) jours qui suivent lâadjudication, toute personne peut faire une surenchĂšre pourvu quâelle soit du dixiĂšme au moins du prix principal de la vente. Le dĂ©lai de surenchĂšre emporte forclusion. Le dĂ©lai prĂ©vu par cet article se calcule conformĂ©ment aux dispositions de lâarticle 335 de lâAUVE. Ainsi le jour de lâadjudication ne sera pas pris en compte pour la computation des dĂ©lais, outre les hypothĂšses dĂ©jĂ Ă©voquĂ©es lorsque le dernier jour est non ouvrable ou chĂŽmĂ©. Dans ce cas, il ya une prorogation des dĂ©lais jusquâau premier jour ouvrable.
Ceci Ă©tant, aprĂšs avoir fait sa dĂ©claration de surenchĂšre, lâarticle 288 impartit au surenchĂ©risseur un dĂ©lai de cinq (05) jours pour la dĂ©noncer Ă lâadjudicataire, au poursuivant et Ă la partie saisie. Mention de cette dĂ©nonciation est faite sur le cahier des charges dans un dĂ©lai de cinq (05) jours. La mĂȘme disposition ajoute que faute de dĂ©nonciation ou de mention de cette dĂ©nonciation dans lesdits dĂ©lais par le surenchĂ©risseur, le poursuivant, le saisi ou tout crĂ©ancier inscrit ou sommĂ© peuvent faire la dĂ©nonciation et sa mention dans les cinq (05) jours qui suivent ; les frais seront supportĂ©s par le surenchĂ©risseur nĂ©gligent.
De ce fait, lâarticle 288 accorde la possibilitĂ© au poursuivant, crĂ©anciers inscrits ou sommĂ©s et au dĂ©biteur saisi de supplĂ©er Ă la carence du surenchĂ©risseur dans lâaccomplissement de la formalitĂ© de la dĂ©nonciation ou celle relative Ă la mention de la dĂ©claration de surenchĂšre dans le cahier des charges au cas oĂč celui-ci aurait nĂ©gligĂ© dâaccomplir cette formalitĂ©.
Le dĂ©lai de cinq (05) jours imparti au poursuivant, crĂ©ancier inscrit et au saisi commence Ă courir Ă lâexpiration du dernier dĂ©lai de cinq (05) jours imparti au surenchĂ©risseur pour la dĂ©nonciation.
Selon les dispositions de lâarticle 288 al.5 et 6, la dĂ©nonciation de surenchĂšre doit indiquer la date de lâaudience Ă©ventuelle au cours de laquelle seront jugĂ©es les contestations de la validitĂ© de la surenchĂšre. Cette audience ne peut ĂȘtre fixĂ©e avant lâexpiration dâun dĂ©lai de vingt (20) jours Ă compter de la dĂ©nonciation. Elle fixe Ă©galement la date de la nouvelle adjudication, laquelle ne peut avoir lieu plus de trente (30) jours aprĂšs celle de lâaudience Ă©ventuelle. Il en rĂ©sulte quâentre la dĂ©nonciation de surenchĂšre et la date de lâaudience Ă©ventuelle, il doit sâĂ©couler un dĂ©lai minimum de vingt (20) jours. Lâaudience ne pouvant ĂȘtre fixĂ©e quâaprĂšs lâexpiration de ce dĂ©lai. En outre, lâActe Uniforme fixe une date butoir de trente (30) jours, aprĂšs lâaudience Ă©ventuelle, date au-delĂ de laquelle lâaudience dâadjudication ne pourra ĂȘtre fixĂ©e. En clair, entre lâaudience Ă©ventuelle et lâadjudication, il ne peut sâĂ©couler plus de trente (30) jours. Cette disposition nâest pas sans rappeler lâarticle 270 al. 2 qui prescrivait dĂ©jĂ la tenue de lâaudience dâadjudication entre le trentiĂšme et le soixantiĂšme jour aprĂšs lâaudience Ă©ventuelle.
Le poursuivant, les crĂ©anciers inscrits ou sommĂ©s, le dĂ©biteur saisi qui entend contester la validitĂ© de la surenchĂšre doit le faire dans un dĂ©lai de cinq (05) jours au moins avant lâaudience Ă©ventuelle (Art.289 al.1). AprĂšs avoir reçu dĂ©nonciation de la surenchĂšre, il peut sans dĂ©lai en contester la validitĂ© et ce, jusquâau cinquiĂšme jour prĂ©cĂ©dant ladite audience. Il sâagit ici encore dâun « dĂ©lai Ă rebours » selon la formule du professeur Anne LEBORGNE .
Par ailleurs, si la surenchĂšre nâest pas contestĂ©e ou si elle est validĂ©e, la nouvelle adjudication doit ĂȘtre prĂ©cĂ©dĂ©e de lâapposition de placards, huit (08) jours au moins avant la vente, conformĂ©ment aux dispositions des articles 276 Ă 279 ci-dessus (Art. 289).
Lâadjudication sur surenchĂšre ne devient une adjudication dĂ©finitive que pour autant que le surenchĂ©risseur ait satisfait aux conditions exigĂ©es par lâarticle 289 de lâAUVE. Lâadjudicataire qui nâapporte pas ces justifications dans les vingt (20) jours de lâadjudication peut ĂȘtre poursuivi par la voie de la folle enchĂšre sans prĂ©judice des autres voies de droit.
II. Des incidents de la saisie immobiliĂšre Ă la distribution du prix
La saisie immobiliĂšre fait souvent lâobjet des incidents (A) soulevĂ©s tant par le saisi que les crĂ©anciers inscrits voire des tiers. Mais lorsque ceux-ci ont Ă©tĂ© Ă©laguĂ©s et lâadjudication poursuivie jusquâĂ son terme, les crĂ©anciers doivent encore procĂ©der Ă la distribution du produit de la vente (B).
A- Les incidents de la saisie immobiliĂšre
De prime abord, il importe de prĂ©senter la procĂ©dure avant dâexaminer les diffĂ©rents incidents de la saisie immobiliĂšre
1)-la procédure
Si le lĂ©gislateur OHADA a dĂ©fini le cahier des charges, il nâa pas dĂ©finit ce quâil entendait par incident de la saisie immobiliĂšre. Câest la jurisprudence qui sâest chargĂ©e de dĂ©finir cette notion. Celle-ci considĂšre comme incident de la saisie immobiliĂšre, « toute contestation nĂ©e de la procĂ©dure de saisie ou qui sây rĂ©fĂšre directement et qui est de nature Ă exercer une influence immĂ©diate et directe sur cette procĂ©dure » . Cette conception restrictive a depuis Ă©voluĂ© puisquâelle admet comme incident de la saisie immobiliĂšre toute contestation mĂȘme si elle porte sur le fond du droit . En effet, la saisie immobiliĂšre fait souvent lâobjet de contestations de la part des parties Ă lâinstance, mais aussi des autres crĂ©anciers inscrits et parfois des tiers qui peuvent formuler des griefs contre la procĂ©dure initiĂ©e par le poursuivant. A cet effet, lâActe Uniforme donne la possibilitĂ© Ă toute personne qui entend contester lâexpropriation entreprise de soulever un incident en respectant les conditions de forme et de dĂ©lai selon lâobjet et lâĂ©poque oĂč la contestation est soulevĂ©e.
a)-Lâacte de contestation
Selon les dispositions de lâarticle 298 de lâAUVE, toute contestation ou demande incidente relative Ă une poursuite de saisie immobiliĂšre formulĂ©e postĂ©rieurement Ă la signification du commandement est formĂ©e par simple acte dâavocat contenant les moyens et conclusions. Elle est formĂ©e, contre toute partie nâayant pas constituĂ© dâavocat, par requĂȘte avec assignation. Cette disposition semble avoir posĂ© une rĂšgle gĂ©nĂ©rale pour prĂ©senter toutes contestations par simple acte dâavocat. Mais en pratique, comme lâont dĂ©jĂ soulignĂ© le Professeur Paul GĂ©rard POUGOUE et MaĂźtre FidĂšle TEPPI KOLLOKO, la partie constituĂ©e avocat va Ă©lever la contestation par un dire. Par ailleurs, la lecture de cette disposition a conduit dâautres plaideurs Ă rĂ©gulariser leurs contestations aux moyens des conclusions en dĂ©pit du fait que lâarticle 270 nâenvisage que les dires et observations. Dans cette optique, un tiers Ă la procĂ©dure peut rĂ©gulariser une requĂȘte aux fins dâintervention volontaire pour solliciter la distraction de son bien dĂšs lors quâil justifie dâun intĂ©rĂȘt dans le litige.
b)-Le moment de la contestation
Le dĂ©lai imparti au contestataire est liĂ© Ă lâobjet de lâincident. En vertu de lâarticle 299 alinĂ©a 1, toutes les contestations doivent ĂȘtre soulevĂ©es avant lâaudience Ă©ventuelle et ce Ă peine de dĂ©chĂ©ance. Il sera rappelĂ© que cette audience est consacrĂ©e Ă statuer sur les contestations qui peuvent surgir Ă lâoccasion de la procĂ©dure de la saisie. De sorte que, toutes les contestations, portant tant sur la rĂ©gularitĂ© de la procĂ©dure suivie que sur les moyens de fond doivent ĂȘtre soulevĂ©s avant cette audience.
Selon le second alinĂ©a du mĂȘme article, les demandes fondĂ©es sur un fait ou un acte survenu ou rĂ©vĂ©lĂ© postĂ©rieurement Ă cette audience et celles tendant Ă faire prononcer la distraction de tout ou partie des biens saisis, la nullitĂ© de tout ou partie de la procĂ©dure suivie Ă lâaudience Ă©ventuelle ou la radiation de la saisie, peuvent encore ĂȘtre prĂ©sentĂ©es aprĂšs lâaudience Ă©ventuelle, mais seulement, Ă peine de dĂ©chĂ©ance, jusquâau huitiĂšme jour avant lâadjudication.
2)- Les principaux incidents
LâActe Uniforme distingue quatre types dâincidents Ă savoir les incidents nĂ©s de la pluralitĂ© de saisie, les demandes en distraction, les demandes en annulation de la saisie et la folle enchĂšre
a) Les incidents nés de la pluralité des saisies
Lorsquâun dĂ©biteur fait lâobjet de plusieurs procĂ©dures de saisies initiĂ©es par divers poursuivants, lâActe Uniforme envisage deux hypothĂšses. Dans un premier temps, les poursuites doivent ĂȘtre continuĂ©es par un seul poursuivant. En cas de dĂ©faillance de sa part, il sera subrogĂ© dans les poursuites par un autre poursuivant.
1) La poursuite de la procédure par le premier poursuivant
Selon lâarticle 302 de lâAUVE, Si deux ou plusieurs saisissants ont fait publier des commandements relatifs Ă des immeubles diffĂ©rents appartenant au mĂȘme dĂ©biteur et dont la saisie est poursuivie devant la mĂȘme juridiction, les poursuites sont rĂ©unies Ă la requĂȘte de la partie la plus diligente et continuĂ©es par le premier saisissant. Si les commandements ont Ă©tĂ© publiĂ©s le mĂȘme jour, la poursuite appartient au crĂ©ancier dont le commandement est le premier en date et, si les commandements sont de mĂȘme jour, au crĂ©ancier le plus ancien. La question reste cependant posĂ©e sâagissant des poursuites engagĂ©es par plusieurs crĂ©anciers sur le mĂȘme immeuble du dĂ©biteur, le texte suscitĂ© nâenvisageant que lâhypothĂšse dâune saisie pratiquĂ©e sur les immeubles diffĂ©rents appartenant au mĂȘme dĂ©biteur et dont la saisie est poursuivie devant le mĂȘme tribunal. Nous osons espĂ©rer que cette omission sera complĂ©ter lors de la reforme de lâActe Uniforme.
2) La subrogation
La subrogation sanctionne la dĂ©faillance du premier poursuivant. Aux termes des dispositions de lâarticle 304 de lâAUVE, faute pour le premier saisissant dâavoir poursuivi sur la seconde saisie Ă lui dĂ©noncĂ©e, le second saisissant peut, par un acte Ă©crit adressĂ© au conservateur de la propriĂ©tĂ© fonciĂšre, demander la subrogation.
La subrogation ne sanctionne pas toujours la dĂ©faillance du poursuivant, puisque lâarticle 305 indique que la subrogation peut ĂȘtre Ă©galement demandĂ©e sâil y a collusion, fraude, nĂ©gligence ou autre cause de retard imputable au saisissant, sans prĂ©judice de dommages-intĂ©rĂȘts envers qui il appartiendra. La subrogation permet de veiller Ă lâaboutissement de la procĂ©dure initiĂ©e par le premier saisissant en donnant les moyens de pression au second crĂ©ancier.
En vertu de lâarticle 305 prĂ©citĂ©, un crĂ©ancier ne peut demander la subrogation que huit (08) jours aprĂšs une sommation restĂ©e infructueuse de continuer les poursuites, faite par acte dâavocat Ă avocat, aux crĂ©anciers dont les commandements ont Ă©tĂ© antĂ©rieurement mentionnĂ©s au bureau de la conservation fonciĂšre. Le saisi nâest pas mis en cause. Il sâen dĂ©duit que la subrogation ne sâopĂšre pas de plein droit, il faut au prĂ©alable que le second saisissant qui entend subroger le premier poursuivant somme ce dernier de continuer les poursuites, faute de quoi, il sera subrogĂ© dans les poursuites. A lâexpiration de ce dĂ©lai, le second saisissant, doit par un acte adressĂ© au conservateur de la propriĂ©tĂ© fonciĂšre, demander la subrogation pour continuer les poursuites Ă la place du premier saisissant dĂ©faillant.
La partie qui succombe sur la contestation relative Ă la subrogation est condamnĂ©e personnellement aux dĂ©pens. Le poursuivant contre lequel la subrogation a Ă©tĂ© prononcĂ©e est tenu de remettre, contre rĂ©cĂ©pissĂ©, les piĂšces de la poursuite au subrogĂ© qui poursuit la procĂ©dure Ă ses risques et pĂ©rils. Par la seule remise des piĂšces, le poursuivant subrogĂ© est dĂ©chargĂ© de toutes ses obligations ; il nâest payĂ© de ses frais de poursuite quâaprĂšs lâadjudication, soit sur le prix, soit par lâadjudicataire (art.306)
b) La distraction de lâimmeuble saisi
Lâarticle 308 de lâActe Uniforme donne la possibilitĂ© au tiers qui se prĂ©tend propriĂ©taire dâun immeuble saisi et qui nâest tenu ni personnellement de la dette, ni rĂ©ellement sur lâimmeuble, de le soustraire Ă la saisie, en formant une demande en distraction avant lâadjudication. Lâaction en distraction est un incident permettant Ă un tiers propriĂ©taire, copropriĂ©taire, usufruitier ou Ă toute personne ayant un droit rĂ©el sur lâ immeuble saisi, de le soustraire de lâassiette de la saisie ; avec cette prĂ©cision que le demandeur Ă la distraction doit ĂȘtre un tiers Ă la procĂ©dure de saisie . Il ne peut ĂȘtre partie Ă la procĂ©dure, mĂȘme en qualitĂ© de tiers dĂ©tenteur, ni ĂȘtre tenu personnellement de la dette cause de la saisie, en qualitĂ© de la caution . Bien sĂ»r, le saisi peut toujours soutenir que lâimmeuble saisi nâest plus sa propriĂ©tĂ© puisquâayant fait lâobjet dâune vente postĂ©rieurement au dĂ©clenchement des poursuites . Il conviendra, dans cette hypothĂšse, de parler plutĂŽt dâune demande en nullitĂ©, et non dâune demande en distraction.
En pratique, le tiers qui ne dĂ©pose pas toujours des dires et observations introduit une requĂȘte en intervention volontaire pour solliciter la distraction de son bien en application des dispositions combinĂ©es des articles 267 et 269 du Code de ProcĂ©dure Civile, Commerciale, Administrative et FinanciĂšre dite CPCCAF et 298 de lâAUVE.
Lâaction en distraction des biens peut encore ĂȘtre prĂ©sentĂ©e aprĂšs lâaudience Ă©ventuelle mais seulement, Ă peine de dĂ©chĂ©ance, jusquâau huitiĂšme jour avant lâadjudication .
c)-Les demandes en annulation
Les demandes en annulation ont pour but de faire sanctionner un acte irrĂ©gulier ou lâomission dâune formalitĂ© prescrite Ă peine de nullitĂ©. Etant donnĂ© que nombreuses sont des formalitĂ©s prescrites Ă peine de nullitĂ©, ce genre dâincidents sont de loin les plus frĂ©quents et les plus nombreux. Ils couvrent aussi bien les nullitĂ©s pour vice de forme que les irrĂ©gularitĂ©s de fond. Les demandes en nullitĂ© doivent ĂȘtre soulevĂ©es par un dire annexĂ© au cahier des charges.
Lâarticle 313 permet de soulever la nullitĂ© du jugement dâadjudication ou du procĂšs verbal notariĂ© dâadjudication. En effet, aux termes des dispositions dudit article, « La nullitĂ© de la dĂ©cision judiciaire ou du procĂšs-verbal notariĂ© dâadjudication ne peut ĂȘtre demandĂ©e par voie dâaction principale en annulation portĂ©e devant la juridiction compĂ©tente dans le ressort de laquelle lâadjudication a Ă©tĂ© faite que dans un dĂ©lai de quinze (15) jours suivant lâadjudication. Elle ne peut ĂȘtre demandĂ©e que pour des causes concomitantes ou postĂ©rieures Ă lâaudience Ă©ventuelle, par tout intĂ©ressĂ©, Ă lâexception de lâadjudicataire. Lâannulation a pour effet dâinvalider la procĂ©dure Ă partir de lâaudience Ă©ventuelle ou postĂ©rieurement Ă celle-ci selon les causes de lâannulation ».
A priori, lâon peut noter que le lĂ©gislateur OHADA met le jugement dâadjudication et le procĂšs verbal dâadjudication au mĂȘme diapason alors que les deux actes nâĂ©manent pas du mĂȘme organe. La raison de cet agencement ne tient pas tant Ă la nature de lâorgane dont Ă©mane lâacte dâadjudication quâaux effets liĂ©s audit acte : le jugement dâadjudication, tout comme le procĂšs verbal dâadjudication sont insusceptibles de recours. Ils ne peuvent faire lâobjet dâopposition, ni dâappel ni, a fortiori, de pourvoi en cassation. Ils ne peuvent que faire lâobjet dâune action en nullitĂ© par voie dâaction principale ou dâexception devant le mĂȘme Tribunal de Grande Instance ayant prononcĂ© lâadjudication ou dans le ressort du tribunal lâadjudication a Ă©tĂ© faite.
Il faut distinguer selon que la demande en nullitĂ© porte sur un acte ou sur la procĂ©dure suivie avant lâaudience Ă©ventuelle, aprĂšs cette audience ou encore sur la dĂ©cision rendue Ă lâaudience dâadjudication ou sur le procĂšs verbal notariĂ© dâadjudication puisque les dĂ©lais varient selon lâobjet de la demande. En principe, en vertu de lâarticle 311 les moyens de nullitĂ©, tant en la forme quâau fond, doivent ĂȘtre soulevĂ©s, cinq (05) jours avant la tenue de lâaudience Ă©ventuelle, et ce, Ă peine de dĂ©chĂ©ance. Toutefois dit lâarticle 299, lorsque la demande en nullitĂ© est fondĂ©e sur un fait ou un acte survenu ou rĂ©vĂ©lĂ© postĂ©rieurement Ă cette audience ou lorsque le demandeur sollicite la nullitĂ© de tout ou partie de la procĂ©dure suivie Ă lâaudience Ă©ventuelle, la demande peut encore ĂȘtre prĂ©sentĂ©e jusquâau huitiĂšme jour avant lâadjudication.
Sâagissant de la demande en nullitĂ© portant sur le jugement dâadjudication ou le procĂšs verbal notariĂ© dâadjudication, celle-ci doit ĂȘtre prĂ©sentĂ©e dans un dĂ©lai de quinze (15) jours suivant lâadjudication Ă peine de dĂ©chĂ©ance.
d) La folle enchĂšre
La folle enchĂšre est un incident de la saisie immobiliĂšre tendant Ă mettre Ă nĂ©ant lâadjudication en raison du manquement de lâadjudicataire Ă ses obligations afin de provoquer une nouvelle vente aux enchĂšres de lâimmeuble. Deux conditions, au demeurant non cumulatives, peuvent justifier lâouverture dâune folle enchĂšre.
Selon lâarticle 314 de lâAUVE, « La folle enchĂšre est ouverte lorsque lâadjudicataire :
1) ne justifie pas, dans les vingt (20) jours suivant lâadjudication, quâil a payĂ© le prix, les frais et satisfait aux conditions du cahier des charges ;
2) ne fait pas publier la dĂ©cision judiciaire ou le procĂšs-verbal notariĂ© dâadjudication Ă la conservation fonciĂšre dans le dĂ©lai prĂ©vu Ă lâarticle 294 ci-dessus » . Il en dĂ©coule que lorsque le prix et les frais taxĂ©s ne sont pas payĂ©s dans le dĂ©lai prescrit ou sâil nâa pas fait publier lâacte dâadjudication dans les deux mois suivant lâadjudication, le saisi, le crĂ©ancier poursuivant et les crĂ©anciers inscrits et chirographaires peuvent intenter une folle enchĂšre. Toutefois la folle enchĂšre peut ne plus ĂȘtre intentĂ©e lorsque lâadjudicataire sâexĂ©cute in extremis et que les causes dâouverture de cette action ont disparu ainsi quâil est dit Ă lâarticle 315 de lâAUVE.
Pour faire la preuve de la dĂ©faillance de lâadjudicataire, lâarticle 316 fait obligation au fol enchĂ©risseur de se faire dĂ©livrer, par le greffier ou par le notaire, un certificat attestant que lâadjudicataire nâa pas justifiĂ© lâexĂ©cution des clauses et conditions du cahier des charges, lequel certificat doit ĂȘtre signifiĂ© Ă lâadjudicataire. Lâarticle 316 indique que « sâil y a opposition de la part de lâadjudicataire Ă la dĂ©livrance de ce certificat, il sera statuĂ©, Ă la requĂȘte de la partie la plus diligente, par le prĂ©sident de la juridiction compĂ©tente et sans recours ». Le prĂ©sident de la juridiction compĂ©tente dont il est question ici est le prĂ©sident du Tribunal de Grande Instance compĂ©tent rationae loci.
Dans les cinq (05) jours de cette signification, il est procĂ©dĂ© Ă la publicitĂ© en vue de la nouvelle adjudication. Les affiches et insertions indiquent les nom, prĂ©noms, domicile ou demeure du fol enchĂ©risseur, le montant de lâadjudication, une mise Ă prix fixĂ©e par le poursuivant, et le jour auquel aura lieu, sur lâancien cahier des charges, la nouvelle adjudication. Le dĂ©lai entre la nouvelle publicitĂ© et la vente est de quinze (15) jours au moins et de trente (30) jours au plus (art.317). Ainsi quinze (15) jours au moins avant lâadjudication, signification est faite Ă lâadjudicataire, au saisi, au saisissant et aux crĂ©anciers, des jours, heure et lieu de lâadjudication. Cette signification est faite par acte dâavocat Ă avocat et, Ă dĂ©faut dâavocat, par exploit dâhuissier ou dâagent dâexĂ©cution.
Dans lâhypothĂšse ou le titre dâadjudication a Ă©tĂ© dĂ©livrĂ©, lâarticle 319 indique que le poursuivant Ă la folle enchĂšre signifie Ă lâadjudicataire, avec commandement, une copie de la dĂ©cision judiciaire ou un procĂšs-verbal notariĂ© dâadjudication. Cinq (05) jours aprĂšs cette signification, il peut procĂ©der Ă la publicitĂ© de la nouvelle vente comme prĂ©vu Ă lâarticle 317 ci-dessus.
Il est dit Ă lâarticle 321 que les formalitĂ©s et dĂ©lais prĂ©vus par les articles 316 Ă 319 suscitĂ©s sont observĂ©s Ă peine de nullitĂ©. Les moyens de nullitĂ© doivent ĂȘtre formulĂ©s cinq (05) jours avant lâadjudication prĂ©vue Ă lâarticle 317 ci-dessus. On peut noter une diffĂ©rence sâagissant des sanctions attachĂ©es Ă lâinobservation des dĂ©lais. Alors que lâarticle 297 alinĂ©a 1 sanctionne lâinobservation des dĂ©lais par la dĂ©chĂ©ance, lâarticle 321 sanctionne de nullitĂ© le non respect des dĂ©lais.
Sâagissant de la vente, lâarticle 322 dispose que sâil nâest pas portĂ© dâenchĂšre, la mise Ă prix peut ĂȘtre diminuĂ©e, dans la limite fixĂ©e par lâarticle 267-10 ci-dessus, par dĂ©cision du prĂ©sident de la juridiction compĂ©tente. Si malgrĂ© cette diminution de la mise Ă prix, aucune enchĂšre nâest portĂ©e, le poursuivant est dĂ©clarĂ© adjudicataire pour la premiĂšre mise Ă prix. Le fol enchĂ©risseur ne peut enchĂ©rir sur la nouvelle adjudication.
Par ailleurs lâarticle 323 fait peser un certain nombre dâobligations sur le fol enchĂ©risseur puisque aux termes de cette disposition, celui-ci est tenu des intĂ©rĂȘts de son prix jusquâau jour de la seconde vente et de la diffĂ©rence de son prix et de celui de la deuxiĂšme adjudication lorsque celui-ci est plus faible. En outre lâalinĂ©a 2 du mĂȘme article prĂ©cise que si le deuxiĂšme prix est plus Ă©levĂ© que le premier, la diffĂ©rence en plus ne lui profite pas. Il ne peut obtenir le remboursement des frais de procĂ©dure et de greffe ni les droits dâenregistrement quâil a payĂ©s.
B -La distribution du prix de vente de lâimmeuble
La distribution du prix de vente de lâimmeuble constitue lâultime phase de la procĂ©dure de saisie immobiliĂšre. Lâordre de la distribution du prix est organisĂ© par les dispositions de lâarticle 225 de lâActe Uniforme portant Organisation des SĂ»retĂ©s. Selon ce texte, « Les deniers provenant de la rĂ©alisation des immeubles sont distribuĂ©s dans lâordre suivant :
1°) aux crĂ©anciers des frais de justice engagĂ©s pour parvenir Ă la rĂ©alisation du bien vendu et Ă la distribution elle-mĂȘme du prix ;
2°) aux créanciers de salaires super privilégiés ;
3°) aux crĂ©anciers titulaires dâune hypothĂšque conventionnelle ou forcĂ©e et aux crĂ©anciers sĂ©paratistes inscrits dans le dĂ©lai lĂ©gal, chacun selon le rang de son inscription au registre de la publicitĂ© immobiliĂšre ;
4°) aux crĂ©anciers munis dâun privilĂšge gĂ©nĂ©ral soumis Ă publicitĂ© chacun selon le rang de son inscription au Registre du Commerce et du CrĂ©dit Mobilier ;
5°) aux crĂ©anciers munis dâun privilĂšge gĂ©nĂ©ral non soumis Ă publicitĂ© selon lâordre Ă©tabli par lâarticle 180 du prĂ©sent Acte Uniforme ;
6°) aux crĂ©anciers chirographaires munis dâun titre exĂ©cutoire lorsquâils sont intervenus par voie de saisie ou dâopposition Ă la procĂ©dure.
En cas dâinsuffisance de deniers pour dĂ©sintĂ©resser les crĂ©anciers dĂ©signĂ©s aux 1°), 2°), 5°) et 6°) du prĂ©sent article venant Ă rang Ă©gal, ceux-ci concourent Ă la distribution dans la proportion de leurs crĂ©ances totales, au marc le franc.
LâActe Uniforme a privilĂ©giĂ© une distribution amiable du produit de la vente afin de ne pas obĂ©rer davantage les frais de poursuite avec lâintroduction dâune action en distribution du prix. Encore faut-il que les crĂ©anciers parviennent Ă un accord ; la divergence des intĂ©rĂȘts des uns et lâintransigeance des autres pouvant ruiner les chances de parvenir Ă lâaccord.
La recherche prĂ©alable dâun accord nâest pas une obligation, un crĂ©ancier pouvant saisir le juge de la distribution. Il a Ă©tĂ© dĂ©cidĂ© que le fait pour un crĂ©ancier de saisir directement le juge de la distribution sans rechercher au prĂ©alable un accord pour parvenir Ă une rĂ©partition amiable ne peut ĂȘtre sanctionnĂ© par lâirrecevabilitĂ© de lâaction ; la seule obligation qui pĂšse sur le demandeur Ă la distribution est de respecter le dĂ©lai dâun mois avant la saisine du juge .
1)-La distribution amiable
La distribution amiable du produit de la vente peut ĂȘtre facilitĂ©e selon que lâon se trouve en prĂ©sence dâun crĂ©ancier unique ou de plusieurs crĂ©anciers.
a)Le créancier unique
En prĂ©sence dâun seul crĂ©ancier le juge nâintervient pas et la rĂ©partition est plus aisĂ©e. Le produit de la vente est remis Ă celui-ci jusquâĂ concurrence du montant de sa crĂ©ance, en principal, intĂ©rĂȘts et frais, dans un dĂ©lai de quinze (15) jours, au plus tard, Ă compter du versement du prix de la vente. Dans le mĂȘme dĂ©lai, le solde est remis au dĂ©biteur. A lâexpiration de ce dĂ©lai, les sommes qui sont dues produisent intĂ©rĂȘt au taux lĂ©gal (art.324)
b) La pluralité des créanciers
En vertu des dispositions de lâarticle 325 de lâAUVE, sâil y a plusieurs crĂ©anciers inscrits ou privilĂ©giĂ©s, ceux-ci peuvent sâentendre sur une rĂ©partition consensuelle du prix de la vente. Dans ce cas, ils adressent leur convention sous seing privĂ© ou sous forme authentique au greffe ou Ă lâauxiliaire de justice qui dĂ©tient les fonds. Le rĂšglement des crĂ©anciers doit ĂȘtre effectuĂ© dans le dĂ©lai de quinze (15) jours Ă compter de la rĂ©ception de lâaccord. Dans le mĂȘme dĂ©lai, le solde est remis au dĂ©biteur. A lâexpiration de ce dĂ©lai, les sommes qui sont dues produisent intĂ©rĂȘt au taux lĂ©gal.
2)-La distribution judiciaire
Elle nâintervient que si, dans le dĂ©lai dâun mois qui suit le versement du prix de la vente, les crĂ©anciers ne sont pas parvenus Ă un accord. Dans ce cas le plus diligent dâentre eux saisit le prĂ©sident du Tribunal de Grande Instance du lieu de la vente ou le magistrat dĂ©lĂ©guĂ© par lui afin de lâentendre statuer sur la rĂ©partition du prix (art.326). Lâarticle 327 ne prĂ©cise pas le mode de saisine du juge compĂ©tent et la question nâest pas dĂ©nuĂ©e dâintĂ©rĂȘt lorsque lâon sait lâimportance que lâActe Uniforme attache au respect du formalisme dans la procĂ©dure de la saisie immobiliĂšre. Mais Ă la lecture de lâarticle 327, il est permis de dire que câest par voie dâassignation que le juge sera saisi puisque selon ce texte, « Cet acte de saisine indique la date de lâaudience et fait sommation aux crĂ©anciers de produire, câest-Ă -dire dâindiquer ce qui leur est dĂ», le rang auquel ils entendent ĂȘtre colloquĂ©s et de communiquer toutes piĂšces justificatives. La sommation reproduit les dispositions de lâarticle 330 ci-aprĂšs ». Lâexploit dâassignation doit Ă©galement ĂȘtre signifiĂ© au saisi , ce dernier ayant intĂ©rĂȘt Ă assister Ă la distribution du produit de la vente afin de voir ses crĂ©anciers ĂȘtre dĂ©sintĂ©ressĂ©s.
Lâaudience ne peut avoir lieu moins de quarante (40) jours aprĂšs la derniĂšre signification.
Apres avoir Ă©tĂ© sommĂ©s, les crĂ©anciers sont tenus de produire leur dĂ©claration de crĂ©ance au greffe. En effet, aux termes des dispositions de lâarticle 330, « dans les vingt (20) jours de la sommation, les crĂ©anciers effectuent leur production au greffe de la juridiction compĂ©tente. Lâexpiration de ce dĂ©lai emporte de plein droit dĂ©chĂ©ance contre les crĂ©anciers non produisants ». Il en rĂ©sulte que le crĂ©ancier qui nâa pas produit sa dĂ©claration de crĂ©ances ou qui lâa effectuĂ© tardivement est dĂ©chu de plein droit . Ce faisant, il perd tout privilĂšge ou tout droit de prĂ©fĂ©rence par rapport aux crĂ©anciers produisants et ne pourra plus faire valoir ses privilĂšges afin quâil soit colloquĂ© par prĂ©fĂ©rence.
De ce fait, lorsque le produit de la vente est insuffisant pour dĂ©sintĂ©resser le crĂ©ancier produisant, la totalitĂ© de la somme lui sera versĂ©e alors quâautrement, une distribution au marc le franc serait envisagĂ© en tenant compte du rang des privilĂšges des crĂ©anciers . PrĂ©cisons toutefois que cette dĂ©chĂ©ance nâest attachĂ©e quâau bĂ©nĂ©fice de la suretĂ© dans le cadre de la distribution du produit de la vente de lâimmeuble, la consĂ©quence est que le crĂ©ancier perd son rang dans la hiĂ©rarchie de crĂ©anciers Ă dĂ©sintĂ©resser en prioritĂ©. Câest dire que mĂȘme dĂ©chu pour production tardive, « celui qui a omis de produire peut se prĂ©valoir, Ă lâencontre des crĂ©anciers chirographaires de son hypothĂšque, et se faire payer avant eux sur le reliquat restant Ă repartir », la dĂ©chĂ©ance ne pouvant purger sa crĂ©ance. Ainsi lorsquâil nây a pas de solde restant, le crĂ©ancier dĂ©chu peut utilement recourir Ă dâautres moyens pour recouvrer le paiement de sa crĂ©ance .
La partie qui entend soulever des contestations doit le faire au moyen des dires qui doivent ĂȘtre dĂ©posĂ©s, au plus tard, cinq (05) jours avant lâaudience. Ils doivent ĂȘtre communiquĂ©s aux autres parties (art.331). Au vu des productions, dires et explications des parties, le juge de la distribution procĂšde Ă la rĂ©partition du prix de la vente. Il peut, pour causes graves et dĂ»ment justifiĂ©es, accorder une remise de la rĂ©partition, et fixer le jour de la nouvelle audience. Signalons que la dĂ©cision judiciaire accordant ou refusant une remise nâest susceptible dâaucun recours (art.332). A contrario, en vertu de lâarticle 333, la dĂ©cision judiciaire rendue sur le fond est susceptible dâappel dans les quinze (15) jours de sa signification. Lâappel nâest recevable que si le montant de la somme contestĂ©e est supĂ©rieur au taux des dĂ©cisions judiciaires rendues en dernier ressort.
Enfin, si lâadjudication ou folle enchĂšre intervient au cours de la procĂ©dure ou mĂȘme aprĂšs le rĂšglement dĂ©finitif, la juridiction compĂ©tente modifie lâĂ©tat de collocation suivant les rĂ©sultats de lâadjudication (art.335).
C -Les voies de recours
Comme toutes dĂ©cisions de justice, les dĂ©cisions rendues en matiĂšre dâexpropriation forcĂ©e peuvent faire lâobjet des vois de recours. Cependant en cette matiĂšre, lâexercice des les voies de recours obĂ©it Ă des conditions particuliĂšres en raison bien entendu de la nature de la dĂ©cision Ă attaquer.
1) Lâappel
Selon lâarticle 300 AUVE « les dĂ©cisions judiciaires rendues en matiĂšre de saisie immobiliĂšre ne sont pas susceptibles dâopposition. Elles ne peuvent ĂȘtre frappĂ©es dâappel que lorsquâelles statuent sur le principe mĂȘme de la crĂ©ance ou sur des moyens de fond tirĂ©s de lâincapacitĂ© dâune des parties, de la propriĂ©tĂ©, de lâinsaisissabilitĂ© ou de lâinaliĂ©nabilitĂ© des biens saisis. Les dĂ©cisions de la juridiction dâappel ne sont pas susceptibles dâopposition. Les voies de recours sont exercĂ©es dans les conditions de droit commun ». Ce texte ferme la voie de lâappel Ă la plupart des dĂ©cisions rendues en matiĂšre de saisie immobiliĂšre ou, Ă tout le moins, le rĂ©duit Ă sa portion congrue en nâautorisant le recours Ă lâappel que dans les conditions limitativement Ă©numĂ©rĂ©es, de sorte que le plaideur qui interjette appel dâune dĂ©cision nâayant pas statuĂ© sur le principe de la crĂ©ance, lâincapacitĂ© dâune des parties, de la propriĂ©tĂ© du bien, de lâinsaisissabilitĂ© ou de lâinaliĂ©nabilitĂ© des biens saisis sera dĂ©clarĂ© irrecevable. Câest ce que rappelle la CCJA. Dans lâaffaire ayant donnĂ© lieu Ă lâarrĂȘt n°2 du 09 mars 2006 , au visa de lâarticle 300 AUVE, pour rejeter le pourvoi formĂ© contre le jugement n°353 rendu par le Tribunal de Grande Instance du Wouri Ă Douala, la Haute Juridiction a dĂ©cidĂ© que le « jugement attaquĂ© rendu en matiĂšre de saisie immobiliĂšre, lequel ne statue ni sur le principe mĂȘme de la crĂ©ance, ni sur des moyens de fonds tirĂ©s de lâincapacitĂ© dâune des parties, ni sur la propriĂ©tĂ© ou lâinsaisissabilitĂ© ou lâaliĂ©nabilitĂ© des biens saisis, nâest pas susceptible dâappel ». Qui plus est, lorsque le tribunal nâa statuĂ© que sur lâannulation des actes de procĂ©dure, lâappel rĂ©gularisĂ© contre un tel jugement est irrecevable .
Selon lâalinĂ©a 4 de lâarticle 300 les voies de recours sont exercĂ©es dans les conditions de droit commun. Cette disposition a suscitĂ© une vive controverse doctrinale alimentĂ©e par une jurisprudence souvent contradictoire, certaines juridictions considĂ©rant que les conditions de droit commun dont sâagit renvoient aux conditions dâexercice dâappel rĂ©gies par le droit national de chaque Etat alors que dâautres estimant quâil sâagit dâun renvoi Ă lâActe Uniforme. Ainsi selon la Cour dâAppel du Littoral au Cameroun, le lĂ©gislateur OHADA nâayant pas prĂ©vu de dĂ©lai dâappel contre les dĂ©cisions rendues en matiĂšre de saisie immobiliĂšre, câest le dĂ©lai de droit commun prĂ©vu par le lĂ©gislateur national qui doit ĂȘtre appliquĂ© . A contrario la Cour dâAppel dâAbidjan estimant pour sa part, quâil rĂ©sulte de la combinaison des articles 300 et 313 de lâAUVE que le dĂ©lai de droit commun pour interjeter appel en matiĂšre de saisie immobiliĂšre est de quinze (15) jours Ă compter du prononcĂ© de la dĂ©cision .
Dans lâaffaire ayant donnĂ© lieu Ă lâarrĂȘt du 18 avril 2002, la CCJA a dĂ©cidĂ© que lâarticle 300 qui prescrit que les dĂ©cisions rendues en matiĂšre de saisie immobiliĂšre ne peuvent ĂȘtre frappĂ©es dâappel que dans certains cas ne prĂ©cise pas le dĂ©lai dâappel ni son point de dĂ©part, indiquant simplement que les voies dâappel sont exercĂ©es dans les conditions de droit commun, quâen lâabsence de dispositions particuliĂšres, le dĂ©lai dâappel pour tout litige relatif Ă une mesure dâexĂ©cution est celui prĂ©vu Ă lâarticle 49 des dispositions gĂ©nĂ©rales de lâActe Uniforme suscitĂ© qui prĂ©cise que la dĂ©cision rendue par la juridiction compĂ©tente pour statuer sur tout litige relatif Ă une mesure dâexĂ©cution est susceptible dâappel dans un dĂ©lai de quinze (15) jours Ă compter de son prononcĂ© , cette jurisprudence devenue constante est toujours rappelĂ©e par la haute juridiction .
ConformĂ©ment aux dispositions de lâarticle301 AUVE, lâappel est notifiĂ© Ă toutes les parties en cause Ă leur domicile rĂ©el ou Ă©lu y compris Ă lâadjudicataire, celui-ci est particuliĂšrement intĂ©ressĂ© par un appel dont lâissue peut remettre en cause son droit de propriĂ©tĂ©, de sorte que les consĂ©quences tirĂ©es dâun appel qui ne lui a pas Ă©tĂ© notifiĂ© conformĂ©ment Ă lâarticle 301 ne peuvent lui ĂȘtre opposables . Lâacte est Ă©galement notifiĂ©, dans le dĂ©lai dâappel, au greffier en chef du Tribunal de Grande Instance, visĂ© et mentionnĂ© par lui au cahier des charges. Lâacte dâappel contient lâexposĂ© des moyens de lâappelant Ă peine de nullitĂ©. Le fait pour lâappelant de ne pas avoir exposĂ© ses moyens dans lâacte dâappel entraine la nullitĂ© dudit acte .La Cour dâAppel statue sous quinzaine.
2)-La cassation
Il convient de rappeler que les dĂ©cisions rendues par les juridictions dâappel en matiĂšre de saisie immobiliĂšre font lâobjet dâun recours en cassation devant la CCJA.
Ceci Ă©tant, sâil est entendu que les dĂ©cisions rendues en matiĂšre de saisie immobiliĂšre ne peuvent ĂȘtre frappĂ©es dâappel que dans les conditions limitativement Ă©numĂ©rĂ©es Ă lâarticle 300 de lâAUVE, la restriction du droit dâappel a pour consĂ©quence dâouvrir la voie de la cassation devant la CCJA aux plaideurs qui nâont pas pu contester le jugement critiquĂ© devant la Cour dâAppel lorsque ledit jugement est insusceptible dâappel. Toutefois, le pourvoi en cassation sera dĂ©clarĂ© irrecevable dĂšs lors que le jugement dĂ©fĂ©rĂ© Ă la censure de la haute juridiction a statuĂ© sur le principe de la propriĂ©tĂ© de lâimmeuble puisquâil est de ce fait, susceptible dâappel . Il en sera de mĂȘme lorsque ledit jugement a statuĂ© sur lâexistence de la crĂ©ance , sur des moyens de fond tirĂ©s de lâincapacitĂ© dâune des parties, ou sur lâexistence de la personne dĂ©bitrice , de lâinsaisissabilitĂ© ou de lâinaliĂ©nabilitĂ© des biens saisis.
Cependant, nombreux sont des dĂ©fendeurs au pourvoi qui soulĂšvent, in limine litis, lâirrecevabilitĂ© du pourvoi en cassation ainsi rĂ©gularisĂ© devant la CCJA par leurs colitigants pour violation des dispositions de lâarticle 14 du traitĂ© institutif de lâOHADA au motif quâun jugement rendu par un tribunal nâĂ©tant ni une dĂ©cision rendue par une juridictions dâappel, ni une dĂ©cision non susceptible dâappel ne peut faire lâobjet dâun pourvoi en cassation. Ce moyen est rĂ©guliĂšrement rejetĂ© par la haute cour puisquâil dĂ©coule dâune lecture biaisĂ©e de lâarticle 14 du traitĂ©. En effet, lâarticle 14 alinĂ©a 4 du traitĂ© OHADA dispose que la CCJA se prononce dans les mĂȘmes conditions sur les dĂ©cisions non susceptibles dâappel rendues par toute juridiction des Etats Parties dans les mĂȘmes contentieux. Or, en matiĂšre de saisie immobiliĂšre, les jugements rendus par les tribunaux sont insusceptibles dâappel lorsquâils nâont pas statuĂ© sur le principe mĂȘme de la crĂ©ance ou sur des moyens de fond tirĂ©s de lâincapacitĂ© dâune des parties, de la propriĂ©tĂ©, de lâinsaisissabilitĂ© ou de lâinaliĂ©nabilitĂ© des biens saisis, de sorte que lâunique voie de recours ouverte au plaideur reste le pourvoi en cassation.
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CONCLUSION
Il ressort de cette rĂ©flexion sur le formalisme de la saisie immobiliĂšre en droit OHADA, que le lĂ©gislateur OHADA accorde une importance particuliĂšre au respect du formalisme dans la mise en Ćuvre de la saisie immobiliĂšre ; ce formalise se dĂ©cline en deux angles : lâobservation des mentions prescrites Ă peine de nullitĂ© et le respect de dĂ©lais assorti de dĂ©chĂ©ance dans lâaccomplissement des actes.
Pour mener Ă bien une saisie immobiliĂšre<<, il est impĂ©rieux de maitriser les subtilitĂ©s de la procĂ©dure, mais aussi de faire preuve dâune dextĂ©ritĂ© remarquable dans lâaccomplissement des actes. Contrairement au rĂ©gime de nullitĂ© de plein droit ou nullitĂ© automatique rĂ©gissant les autres mesure dâexĂ©cution instituĂ© par lâActe Uniforme portant Organisation des ProcĂ©dures SimplifiĂ©es de Recouvrement et des Voies dâExĂ©cution, en matiĂšre de saisie immobiliĂšre, lâActe Uniforme consacre le rĂ©gime des nullitĂ©s avec grief, de sorte que le moyen tirĂ© de nullitĂ© articulĂ© contre un acte viciĂ© ne peut ĂȘtre accueilli que lorsque lâirrĂ©gularitĂ© a eu pour effet de causer un prĂ©judice aux intĂ©rĂȘts de celui qui lâinvoque. Lâexigence dâun grief permet dâattĂ©nuer les effets fĂącheux dâun rĂ©gime de nullitĂ© assez rigide pouvant permettre au dĂ©biteur de mauvaise foi dâĂ©chapper aux poursuites.
Cette exigence sâestompe lorsquâun plaideur poursuit la dĂ©chĂ©ance dâun acte pour inobservation de dĂ©lai, la dĂ©chĂ©ance Ă©tant acquise de plein droit Ă lâexpiration du dĂ©lai fixĂ© sans que le plaideur qui lâinvoque ne puisse justifier lâexistence dâun prĂ©judice.
La saisie immobiliĂšre exige une attention soutenue, la moindre inattention peut ruiner toute la procĂ©dure et avec elle, parfois, lâespoir de recouvrer une crĂ©ance si essentielle pour lâentreprise. En dĂ©pit de la volontĂ© affichĂ©e par le lĂ©gislateur OHADA de limiter les manĆuvres dilatoires, lâaccĂ©lĂ©ration du temps du procĂšs de la saisie immobiliĂšre, en vue de favoriser la cĂ©lĂ©ritĂ© de lâinstance judiciaire se fait toujours attendre. Le contentieux de la saisie immobiliĂšre nâa pas Ă©chappĂ© Ă la lenteur de la justice, hĂ©las !
En dĂ©finitive, le lĂ©gislateur OHADA devra profiter du chantier de la reforme de lâActe Uniforme portant Organisation des ProcĂ©dures SimplifiĂ©es de Recouvrement et des Voies dâExĂ©cution pour reformer en profondeur la procĂ©dure de la saisie immobiliĂšre en tenant compte des difficultĂ©s liĂ©es Ă la pratique pour limiter, les manĆuvres dilatoires du dĂ©biteur, mais aussi pour toiletter certaines dispositions et contribuer, in fine, Ă lâefficacitĂ© de cette mesure dâexĂ©cution si indispensable pour la sĂ©curisation de lâinvestissement.
Guy Saturnin TSETSA
Magistrat,                                                                                                                                                                                                     Â
Juge au Tribunal de Grande Instance dâOwando, R. Congo
Revue de lâERSUMA :: Droit des affaires – Pratique Professionnelle, N° 6 – Janvier 2016, Doctrine.